Il y
a donc deux usages (au moins) de cet album
:
- on
peut le feuilleter et s'amuser à
retrouver les formes originales des lettres
usuelles (c'est l'utilisation qui en sera
faite d'abord, aux cycles 1 et 2),
- on peut continuer à interroger,
et sous différents angles, la représentation
proposée.
Les
nouveaux programmes soulignent que la "
rencontre avec les uvres, indispensable
à la diffusion démocratique
de la culture ", la " compréhension
des réalités artistiques et
culturelles " passent aussi par la "
conscience qu'il existe différentes
manières de rendre compte de la réalité
", par la capacité de l 'élève
à " orienter sa perception ses
choses " (1) .
Notre abécédaire peut être
l'occasion de s'interroger sur la notion de
" réalisme " et sur les choix
et points de vue qui orientent la représentation
du monde chez les peintres signalés
plus haut. Il prolonge la réflexion
engagée par la lecture d'autres ouvrages
cités dans la constellation (M comme
Manet, T comme Toulouse-Lautrec
)
La reconnaissance
de l'" étrangeté "
de la ville américaine peut conduire
à chercher des équivalences
(mais non des copies) dans les paysages de
nos villes et villages, à condition
de travailler les trouvailles à la
manière de Stephen T. Johnson (cadrages,
couleurs, trucages
), c'est à
dire à condition de mettre en valeur
et renforcer la relation, la circulation entre
ce que disent les images et le système
typographique représenté. La
présentation à d'autres du travail
réalisé conduira à se
poser la question de la lisibilité
des propositions.
Nous
disions plus haut, dans le commentaire pédagogique,
que chaque lettre " attend son histoire
". Des exercices d'écriture peuvent
être proposés soit sous la forme
de monographies discontinues (" Je suis
le A
. "), soit sous la forme d'une
enquête qui reconstituerait l'ensemble
dispersé à travers la ville
(" À la recherche d'un alphabet
perdu
").
Alphabetville
remet en mémoire ce que Massin écrivait,
dans La Lettre et l'Image (Gallimard
1972), et que rappelle Georges Jean, dans
L'Écriture, mémoire des hommes
(Découvertes Gallimard 1987 p.132)
: " La ville est un grand livre ouvert,
d'une écriture anonyme. Il suffit de
regarder : les images vous parlent ".
Et il énumère tous les messages,
toutes les invitations à lire que les
murs, les vitrines, les panneaux mettent sous
nos yeux, "
et tous les néons
qui courent, les mots qui clignotent, les
lettres qui grimpent aux enseignes ou en dégringolent.
Les caravanes publicitaires, la publicité
ambulante, les hommes-sandwiches et les pochettes
d'emballage qui marchent de conserve avec
les piétons.". Invitation encore
à se servir de cette " forte densité
typographique " qu'offre la ville aujourd'hui.
(1)
Qu'apprend-on à l'école élémentaire
- CNDP - XO Editions, 2002 - p.260-261.