Il s’agit d’une étude clinique d’une enseignante débutante en EPS, interrogeant le poids de son expérience personnelle sur son enseignement effectif. Les enseignements de lutte et de danse à une même classe de 6e forment le terrain de l’analyse.
L’intention est ici en premier lieu épistémologique. Il s’agit d’examiner dans quelle mesure la perspective clinique dans la recherche en didactique permet d’apporter des éléments de compréhension du processus de transmission des savoirs. En effet, on tente de montrer que la prise en compte du sujet enseignant dans la recherche permet d’identifier le jeu de codéterminations qui s’instaure entre les contraintes didactiques et institutionnelles de la situation effective d’enseignement et la subjectivité de l’enseignant. Le rapport de l’enseignant au savoir formé au cours de son expérience, sa position symbolique dans la classe et la dialectique dévolution / institutionnalisation sous-jacente au processus de transmission des savoirs permettent d’interpréter ce jeu de codéterminations.
À partir d’entretiens, l’expérience de l’enseignante a pu être identifiée. L’analyse des fiches de préparation de séance, l’observation vidéo des cours et des entretiens post-séance ont permis d’examiner les objets de savoirs prévus pour être enseignés, ceux effectivement enseignés et leur justification par l’enseignante.
Les résultats obtenus montrent que des expériences antérieures déplaisantes dans la pratique des activités orientent l’enseignante à éviter de transmettre certains objets de savoir, mais que sa position symbolique dans l’espace didactique la contraint à transmettre tout de même ces savoirs dans des configurations spécifiques, ceci afin de maintenir son autorité didactique parfois ambiguë face aux élèves.
Ceci révèle ainsi la nécessité, dans la formation initiale des enseignants, de faire prendre conscience à ces derniers de leur propre rapport au savoir, comme un processus déterminant à leur insu le contenu et la forme de leur transmission.