Ces dernières décennies, la littérature de jeunesse est devenue incontournable. De plus en plus de livres, revues, sites Internet, bibliothèques et expositions lui sont consacrés. Une place essentielle lui est faite également à l’école. Dès la maternelle, les instructions officielles recommandent la fréquentation régulière d’albums lus par le maître et utilisés par les élèves. Mais qu’en est-il des pratiques pédagogiques ? Les enseignants utilisent-ils la littérature de jeunesse comme support d’enseignement et quels en sont les effets en termes d’apprentissage ? Comment font-ils leur choix parmi la grande diversité de l’offre disponible sur le marché de l’édition ?
Pour tenter de répondre à ces interrogations, nous avons rencontré 27 enseignants de cycle II (6 en grande section de maternelle, 12 en CP et 9 en CE1), issus de 10 écoles situées dans un quartier périphérique classé ZEP. Ils ont répondu à un questionnaire permettant de mieux connaître leurs pratiques d’enseignement de la langue écrite et leurs élèves ont participé à une épreuve de production d’écrit. De plus, les enseignants ont été confrontés à une tâche de manipulation de livres de jeunesse articulée à un entretien : 25 albums sont présentés, ils doivent en choisir 5 qu’ils envisageraient d’utiliser en classe et en exclure 5 autres, tout en expliquant leurs choix. Le choix des livres repose sur 5 catégories préalablement repérées : « les anciens » (écrits avant la 2e guerre mondiale), « les livres résistants » (Tauveron, 1999), « les livres supports » susceptibles de s’utiliser pour des activités autres que la lecture, « les livres thématiques » et « les classiques pédagogiques ».
L’analyse des données montre notamment que les choix personnels ou didactiques des enseignants, ainsi que leur comportement à l’égard de ces livres varient en fonction des représentations qu’ils se font de la littérature de jeunesse. En outre, l’utilisation d’albums en classe influerait sur la manière dont les élèves produisent un récit.