Nous présentons ici une étude qui contribue à une meilleure compréhension de constituants de l’écriture que sont, entre autres, la quantité et la nature des lettres utilisées par l’enfant du stade préopératoire.
Quand on demande à un jeune enfant d’écrire des mots qu’il ne sait pas encore écrire, avant d’utiliser une procédure phonographique, il écrit des suites aléatoires de lettres en partie inspirées de son propre prénom. Cette étude observe des suites de lettres, décrit les procédés d’écriture dont un que nous appelons « autocopie » lorsque l’enfant profite du voisinage visuel de ses écritures précédentes pour écrire un nouveau mot. L’observation d’un échantillon de 117 enfants montre un effet voisinage visuel qui se traduit par des comportements d’autocopie. Selon que l’enfant a la possibilité de voir les mots qu’il a déjà écrits ou non et selon l’axe vertical ou l’axe horizontal de la vision, ses productions ne montrent pas les mêmes procédés d’écriture.
D’autre part, des entretiens cliniques nous permettent de comprendre que les procédés d’autocopie sont un moyen pour l’enfant d’alléger sa charge cognitive et ont pour effet d’entretenir des conceptions visuelles de l’écrit, voire de participer à leur construction, certains enfants se révélant, plus que d’autres, dépendants de la nature de la tâche demandée. On observe enfin que quand l’enfant commence le traitement de l’oral, il l’aborde avec ses propres procédés d’autocopie étroitement associés à ses conceptualisations de l’écrit. Des implications méthodologiques, didactiques et épistémologiques sont discutées. Ces résultats mettent en cause, pour les méthodologies basées sur un protocole d’écriture inventée, le recueil de données en liste. Ils incitent également au développement d’activités d’écriture de type résolution de problème et plaident en faveur d’un processus cognitif d’entrée dans l’écrit individuel.