Cette recherche vise à présenter un aspect méconnu et fondamental de la méthode de gymnastique développée dès 1816, en France, par le gymnasiarque d’origine espagnole Amoros. Souvent définie par ses seuls aspects pragmatiques ou ses applications militaires, l’entreprise amorosienne doit au contraire être envisagée dans une perspective éducative beaucoup plus large, celle de l’édification du citoyen moderne sur la base de sa construction comme sujet moral. Ainsi, à partir d’une conception de la morale développée par les Idéologues et inscrite dans les lois naturelles, Amoros prescrit ses exercices physiques pour atteindre l’homme intérieur, modifier sa conscience et son sens civique. Sa gymnastique définie comme de la vertu agissante ou pratique, s’apparente à un véritable catéchisme du citoyen. Elle trouve alors son terme dans les projets éducatifs des sociétés modernes et libérales qui, répondant à l’instant révolutionnaire, cherchent autour de l’idée du droit naturel, à orienter la question de l’homme vers la définition de ses droits, de ses devoirs, de sa liberté et de ses contraintes. Sur la base de l’analyse des rapports du physique et du moral renouvelée par Cabanis, la méthode d’Amoros, loin de n’être qu’un complément à l’éducation morale et intellectuelle, doit alors être comprise comme l’un de ses moyens indispensables. Cela, à partir d’une approche résolument sensualiste de l’homme qui fait de l’éducation physique un outil important du développement de l’entendement et de la raison de l’homme. Avec Amoros, la gymnastique se voit donc offrir, comme jamais auparavant, une orientation résolument éducative. A ce titre, elle participe alors pleinement à l’aboutissement du projet philanthropique des membres de la société pour l’instruction élémentaire de propager les lumières, notamment au sein des classes populaires.