Les enseignants novices d’éducation physique et sportive débutent parfois dans des contextes scolaires difficiles. C’est au prix d’expériences douloureuses qu’ils apprennent à maintenir l’ordre en classe et à mettre les élèves au travail (Durand, 2001). Ces expériences, même quand elles ne sont pas exprimées, suscitent des doutes et entravent parfois le développement de l’activité professionnelle au quotidien (Clot, 1999).
Notre étude a été menée en collaboration avec un enseignant novice d’EPS (Jean) exerçant en milieu difficile. Deux leçons avec une même classe de 4e dans un collège du 18e arrondissement de Paris classé en zone éducation prioritaire (ZEP) ont été enregistrées en audio et vidéo. Après chaque leçon, Jean disposait de la vidéo de la leçon comme support pour réaliser l’entretien. Les entretiens ont permis de problématiser les expériences de classe qui ont été jugées insatisfaisantes a posteriori par l’enseignant novice et d’engager un débat critique à propos des actions professionnelles et des événements observés.
Les résultats montrent que l’enseignant novice a réalisé des actions nouvelles en classe à partir des propositions qui ont été envisagées et co-construites lors des entretiens. La formulation de règles d’action possibles en correspondance avec une pratique d’enseignement problématisée, est apparue comme une des circonstances facilitant à la fois le développement du pouvoir d’action en classe chez l’enseignant novice et du pouvoir d’analyse de son travail quotidien. De façon plus générale, l’indexation des actions réalisées en classe à la situation d’entretien fournit des éléments de discussion du concept de migration fonctionnelle de l’expérience (Vygotski, 2003) et alimente une formalisation des conditions de la formation par alternance dans les IUFM.