Dans les ateliers de clinique des pratiques professionnelles, le formateur en travail social est amené à privilégier une posture singulière dès lors qu’il refuse une institutionnalisation de la parole, bâillonnée dans des allants de soi pédagogiques. C’est dans un entre-deux institutionnel signifiant que sa posture, conjuguée au travail groupal, favorise un processus de professionnalisation réflexive. Entre temps contraint organisationnel et temps plastique relationnel, entre contrôle et création de sens, cette posture du formateur n’est pas seulement éthique au sens courant du terme en usage dans le milieu professionnel au regard des valeurs du travail social, elle est éthique au sens d’un arrachement de soi, aux autres, de soi à l’institution. Elle est éthique au sens du tragique de l’être humain toujours solitaire dans sa prise de décision et en tant que telle, elle s’ancre, en situation, dans une signification à la fois symbolique et mythologique. Elle oblige les étudiants, à partir d’un travail sur eux-mêmes, à exercer un regard critique et à sortir du moule de la formation prescrite. Les savoirs ainsi produits dans un accompagnement clinique des étudiants, sujets de parole et d’acte, seront transférables dans la pratique quotidienne du travail social : travail de liens, d’accompagnements et d’évaluations plurielles.
Un atelier de clinique des pratiques de dix étudiants, assistants de service social en deuxième année de formation a constitué notre terrain de recherche. Chacun des étudiants a été interviewé sur l’année suivante de formation. C’est dans une méthodologie clinique que nous avons inscrit notre recherche, mené les entretiens et travaillé sur le matériau ainsi recueilli. Certains de ces étudiants ont été ensuite interviewés quelques mois après leur prise de fonction afin d’affiner notre recherche en terme de transférabilité des savoirs réflexifs dans la pratique professionnelle.