La thèse selon laquelle les bouleversements dans l’engagement corporel organisent le passage du processus passif affectif vers un processus actif sensible dans l’apprentissage, invite à penser la formation d’une autre façon. La recherche que nous avons menée a permis de faire émerger un nouveau paradigme de l’acquisition de compétences. La démonstration a été faite par l’étude de la nature des engagements corporels d’artistes/danseurs ou de sportifs de haut niveau lors d’une pratique de représentations ou de performances filmées, puis interprétée à partir d’entretiens cliniques. Les résultats ont permis de re-questionner la transmission scolaire par le vertige, présent ou absent dans la transmission. La mise en situation révélatrice de bouleversement émotionnel en milieu scolaire, autorisant de nouvelles formes de réponses dans l’apprentissage, est absente. Ainsi le « vertige du savoir » qu’utilisent les plus grands pour accéder au dépassement n’est pas présent en milieu scolaire. Son absence se caractérise par la négation ou la méconnaissance des formes humaines d’engagement corporel organisé par la résistance à percevoir. La domination quasi exclusive de l’utilisation de la vue pour « savoir que » ou « savoir sur » se fait au détriment du « sentir que » indispensable pour solliciter tous les sens. Il est question alors de synesthésie pour apprendre.
Si innovation il y a dans cette recherche, elle se lit au travers du souci nouveau qu’a l’apprenant. Souci de passer d’un apprentissage déterminé sous autorité à une autodétermination du savoir. Apprendre sous sa propre autorité sensible, néanmoins éclairée par la mise en situation réelle du fait culturel qui enseigne. Désormais l’enseignant, dans la transmission, peut s’appuyer sur des connaissances à percevoir par un questionnement sensible de l’objet culturel de référence. Objet mettant en bouleversement l’acquis, favorisant l’émergence de nouvelles compétences.