Contribution recherchée

Atelier no 12 : Quelles approches pour faciliter le développement des personnes dans les organisations d'éducation et de formation ?

Titre Questionner l'action d'apprendre : une piste pour réduire les difficultés scolaires
Auteur(s) PIOT Thierry

Texte
Les difficultés scolaires touchent de manière récurrente un noyau d'environ 12% des élèves. Si l'on a souvent cherché à expliquer ces difficultés en identifiant leurs causes possibles en dehors de la sphère scolaire (théorie innéiste du don; handicap socio-culturel), il y a également nécessité d'interroger l'école. Notre recherche en cours s'intéresse aux situations d'enseignement- - apprentissage et aux élèves «face à la tâche scolaire», à la fois contextualisée, instrumentale, et finalisée. On évalue souvent l'élève à l'aune de ses performances écrites qui sont le produit des apprentissages réalisés, mais les informations alors disponibles ne nous permettent que de manière lacunaire d'inférer les procédures cognitives mobilisées par l'élève: les interventions pour l'aider, même éclairées de l'expérience et l'empathie de l'enseignant, restent souvent infructueuses.
A partir de l'entretien d'explicitation, formalisé par P. Vermersch, nous expérimenté dans le cadre d'un GFR un dispositif pédagogique où l'enseignant ne se limite pas à interroger l'élève sur ses connaissances mais où il questionne l'élève, c'est à dire prend le risque d'une interaction pédagogique où il n'est pas «celui-qui-sait»: à la question «comment fais-tu pour trouver le sujet de cette phrase?», il n'a pas a priori la réponse. De la description par l'élève des procédures qu'il met en place, l'enseignant, s'il y est formé, peut inférer les savoirs et savoir-faire effectivement mobilisés, les objectifs visés par l'élève. Il dispose ainsi d'informations à la fois personnalisées et précises qui peuvent lui permettre de conduire une médiation singulière et contextualisée. L'explicitation des élèves a permis d'identifier des malentendus, véritables précurseurs de la difficulté scolaire: les mal-dits, où le langage savant de l'école n'est pas audible par les catégories d'interprétation disponibles chez l'élève; les non-dits, véritables allant-de-soi où apparaissent en creux les implicites de l'école. Ces malentendus distinguent d'un côté les enseignants, tenus pour des experts, et les élèves en situation de réussite, qui partagent une connivence implicite relativement «à ce qu'il faut faire pour réussir à l'école» et de l'autre côté les élèves en difficulté (et bien souvent leurs familles) pour qui l'institution scolaire est une terre étrangère, voire hostile, dont les attentes réelles sont difficilement déchiffrables. On identifie ainsi des liens faibles entre les savoirs et savoir-faire scolaires qui restent étanches et isolés dans des mécanismes vides de sens et les situation-problèmes où l'enseignant attend vainement leur transfert. Par ailleurs, l'explicitation par les élèves de leur activité cognitive, leur permet de s'auto-informer et de conceptualiser progressivement leur propre fonctionnement, condition indispensable pour dépasser une difficulté d'apprentissage et reprendre confiance en eux.