Dans leur forme la plus courante, les environnements numériques de travail et d'apprentissage partagés sont des systèmes informatiques qui mettent en oeuvre des solutions matérielles et logicielles intégrées, afin d'offrir à différents groupes d'utilisateurs de multiples fonctionnalités de traitement de document et de communication, tels que le font les cartables numériques, les plates-formes d'enseignement à distance (EAD), les bureaux virtuels, etc. Tous ces dispositifs ont ceci de particulier qu'ils mettent en présence des acteurs parfois distants (enseignants et apprenants) engagés dans des tâches collectives à des fins d'acquisition de connaissances et qu'ils mobilisent chez chacun d'eux un ensemble complexe d'habiletés (disciplinaires, techniques) dont le niveau d'élaboration, souvent extrêmement variable d'un sujet à l'autre, conditionnement en même temps le succès de la tâche à accomplir.
Cette communication vise à relier un certain nombre de concepts-clés déjà disponibles dans la littérature, afin de fournir un cadre d'interprétation des difficultés d'utilisation et d'apprentissage que pose ce type de dispositif. Parmi ces concepts, ceux de compétence, d'instrument, de travail collaboratif, d'intelligence distribuée apparaissent dans des édifices théoriques distincts, dont le rapprochement nous paraît fécond. Nous montrerons, en effet, comment à travers ce rapprochement, il est possible de rendre compte d'obstacles individuels à des actions collectives finalisées et réalisées à l'aide d'un système technique. Nous discuterons notamment de l'intérêt de la notion de conflit instrumental, qui se propose de désigner les interférences entre les niveaux d'appropriation des objets symboliques, des objets techniques et des objets sociaux en jeu dans ces environnements actuels.