Contribution recherchée

Atelier no 13 : Comment l'éducation familiale peut-elle s'articuler avec les institutions scolaires et universitaires ?

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Titre Le venin pédagogique
Auteur(s) BARRAS Christine

Texte
La pédagogie noire est une maltraitance légitimée par un groupe social, infligée «pour le bien de l'enfant», qui s'impose sans révolte possible parce qu'elle n'est pas identifiée comme telle. Elle se caractérise par une grande réserve, une incapacité de désir, par une distance physique et affective entre l'enfant et l'adulte; en même temps; la relation peut être empreinte d'un attachement fusionnel à la famille et aux idéaux qu'elle défend. Dans l'éducation empreinte de pédagogie noire, l'importance est accordée à la structure dans ses moindres détails: rituel de l'ordre, des horaires, des repas. La vision est toute entière plongée dans le quotidien minuscule, lui-même au service de valeurs très lointaines (le chef, le parti, la religion), infiniment pesantes. Entre les deux, c'est le vide. Tout ce qui pourrait y prendre place (les goûts personnels, l'humour, les conflits, les marques d'affection) est balayé, parce que menaçant.
L'absence de doute caractérise la pédagogie noire. Or, un parent qui ne doute pas n'offre pas à son enfant la possibilité de faire des choix, d'argumenter, de construire son raisonnement. Non seulement il dirige le destin des enfants, mais il a le pouvoir de décider ce qui est bien et mal. L'intention de l'adulte est de faire de l'enfant un adulte conforme à un idéal. La pédagogie noire s'appuie sur des sentiments de culpabilité issus du passé et traduisant l'impuissance de l'enfant face à une situation qui le dépasse. La pédagogie noire offre ainsi des risques de transmission accrus.
La traduction anglaise de «pédagogie noire», «poisonous pedagogy», fait penser à l'instillation lente et durable de représentations, de certitudes et de gestes. En reste-t-il des traces chez les jeunes d'aujourd'hui, nourris de démocratie? La communication se fonde sur les reliquats de la pédagogie noire décelés dans une enquête menée auprès de 120 jeunes de 18 à 20 ans, qui se prononcent sur le bon usage ou non de la fessée, sur l'autorité «qui va de soi» et le bien-fondé des méthodes musclées qui «nous apprennent à vivre».