Le travail social ne découvre pas l'économique et le politique, il y a toujours été confronté. Ses modalités, ses instruments, les pratiques de ses agents sont aujourd'hui mis à l'épreuve de la mondialisation dite libérale et des déréglementations que celle-ci impose aux Etats. Depuis le début des années quatre vingt dix "l'éventualité un peu effrayante d'une installation dans l'insertion" est devenue une réalité. Ce tournant ne peut se comprendre qu'après avoir appréhendé le contexte global international appelé période néolibérale ou encore phase de mondialisation au risque d'y voir une simple répétition de l'histoire.Une analyse synthétique des causes et des effets de la nouvelle forme que prend depuis les années 1990 la mondialisation sur la politique sociale en France permettra la lecture du nouveau mode de gestion de l'éducation spécialisée: mode entrepreneurial et pénal. S'appuyant sur la rationalisation et la performance des initiatives d'une part, et la responsabilisation/isolement du marginal ou du handicapé, d'autre part, ce nouveau mode de gestion se dote d'instruments spécifiques tels que le projet, la démarche qualité, l'implication, la citoyenneté, la réparation ....que les deux lois rénovant l'action sociale et médico-sociale et de programmation et d'orientation de la justice sont venues reconnaître et imposer. Les praticiens de l'éducation spécialisée semblent s'être emparés de ces thèmes " néolibéraux ". Une enquête de terrain auprès de 500 praticiens révèle que les rapports à l'usager et aux moyens de travail institutionnels de ceux-ci sont emprunts de valeurs normatives, que les représentations de la majorité des praticiens sont faites de pseudo-concepts ou de "prêts à penser" diffusés par les médias. Faute d'"efforts collectifs d'objectivation, d'analyse, de pronostic, d'évaluation" les éducateurs ne risquent-ils pas de devenir de simples auxiliaires de l'appareil répressif ou des agents de l'humanitaire?