Introduction
Les structures dans les quelles nous travaillons mettent en place de plus en plus
de réunions, de groupe de travail, de groupe de recherche et de développement
auxquels il convient de participer si l'on désire maintenir son niveau
d'information et de là son pouvoir décisionnel. Ces activités
viennent se rajouter au travail quotidien, de sorte que nos plannings sont remplis
et qu'il devient impossible de répondre aux demandes urgentes de dernières
minutes sans devoir annuler un rendez-vous, une réunion. Travailler autrement,
à distance, devrait permettre de regrouper à tous moments, les connaissances
professionnelles nécessaires pour réagir. Le travail collaboratif
" asynchrone " devrait faciliter, avec le support d'une technologie
appropriée, la diffusion numérique immédiate des informations
à un groupe professionnel donné, éloignés ou non,
en raccourcissant les délais de recherche de l'information. Nous faisons
l'hypothèse que les T.I.C et particulièrement les systèmes
autorisant le travail collaboratif devraient permettre des échanges d'informations,
des résolutions de problèmes et des prises de décision, sans
pour cela monopoliser tout notre temps. Dans ce cadre, nous présentons
ici les résultats d'un travail de recherche portant sur l'élaboration
d'une plate forme de travail collaboratif à distance dans le cadre de la
formation continue des enseignants (Ranucci JF, 2001).
Problématique et réalisation
Le développement d'une pratique collective basée sur l'utilisation
d'outils de travail collaboratif est-il réaliste ? Nous observons, sur
le terrain, que l'utilisation des T.I.C se généralise et que le
courrier électronique est l'outil de communication le plus utilisé
dans nos structures. Nous faisons alors comme hypothèse qu'un système,
de gestion des connaissances et des savoirs, basé sur un outil connu
de tous, ayant la capacité technique d'interconnecter les individus et
les lieux de ressources entre eux, devrait être rapidement intégré
dans le fonctionnement d'un groupe de travail. Des travaux (Comtet I., 1999),
sur le travail collaboratif, énonce quatre principes clés de développement
que je vais citer :
Ø Le premier concerne le choix d'objectifs communs à plusieurs
individus, rendu possible par les nouvelles structures (équipes projets,
microgroupes...) qui permettent typiquement de travailler autour de buts partagés
dans lesquels chaque individu est responsable d'une partie de l'activité.
Ø Le second principe intègre la notion de compétences partagées
dans la mesure où les T.I.C (telles que la vidéoconférence
ou la conférence électronique) incitent à une mise en commun
des connaissances individuelles et collectives émergentes des groupes
et des compétences de l'organisation.
Ø Le troisième niveau de changement organisationnel intervient
autour du travail en commun: un objectif des systèmes collaboratifs est
de faciliter le travail en équipes, en permettant même à
celles qui ne font pas partie du noyau de base de participer au travail de tous.
Ø Enfin, le dernier principe correspond à celui des prises de
décisions communes, facilitées par le meilleur accès aux
informations et donc par un meilleur partage des données. Cette mutualisation
des informations, dans certains contextes professionnels à niveau de
qualification suffisamment homogène, notamment ceux de la recherche scientifique,
tend à engager un mode de communication interne plus " horizontal
" dans lequel les règles de fonctionnement hiérarchique sont
réduites ou atténuées (Jaeger, Rallet, 1990).
Nous retiendrons les idées de ces principes pour la suite de notre travail
de recherche. Celui-ci, appuyé par un travail réalisé sur
l'élaboration d'un système de gestion des connaissances et des
savoirs (Giraud E, 2000), était basé sur la possibilité
de mettre en place une structure évolutive offrant une souplesse d'utilisation
comparable à celle d'un site Web tout en offrant, de manière partiellement
transparente des possibilités de recherche, de classement et de tri d'informations.
Un espace de travail collaboratif étant, bien entendu ménagé
au cur de ce système de gestion de connaissances. Après
un travail de recherche sur l'existant et notamment sur tous les statuts et
les protocoles de communication au sein de l'entreprise (Jordan, 1997), les
solutions techniques facilitant le travail collaboratif (Mintzberg, 1983), (Mosvik,
1986),ainsi que les effets démobilisateurs (Grudin, 1988), (Chen, 1990)
et l'élaboration d'un cahier des charges avec les formateurs concernés,
nous sommes parvenus à réaliser une plate forme de travail collaboratif.
Cet espace se présente sous la forme d'un site Web privatif, avec accès
protégé, il possède plusieurs rubriques qui constituent
un bureau virtuel, où toutes les informations déposées
sont accessibles aussi bien pour la consultation que pour les annotations. L'accès
aux ressources est facilité par l'utilisation de moteurs de recherche
travaillant à partir de l'indexation sur texte intégral. Cet espace,
permet de répondre aux besoins les plus couramment exprimés des
groupes de travail, c'est à dire, recueillir, diffuser, rechercher, valoriser
et mémoriser l'information. Il offre un journal décrivant l'actualité
du travail du groupe, des bases de données dynamiques permettant la mémorisation
des données transmises et le classement de celles-ci, l'utilisateur ne
voyant sur l'interface graphique que des noms de rubriques. Une liste de diffusion
sur laquelle les membres du groupe peuvent ou non s'y inscrire . Pour faciliter
le travail coopératif sur les documents déposés sur cet
espace, tous les participants peuvent y mettre des annotations et tous peuvent
les lire, cela en conservant " l'actualité " du travail, c'est
à dire le référencement par rapport à l'auteur et
à la date du travail réalisé.
Résultats et conclusion de l'expérimentation.
La première phase d'expérimentation s'est déroulée
sur une période de trois mois. Les premiers résultats sur l'utilisation
de la plate forme sont les suivants :
Travaux sur la plate forme :
Ø 27 ressources disponibles
Ø 8 documents déposés
Ø 19 signets
Ø 5 ressources annotées (discussion, réflexion autour de
ce qui à été apporté)
Ø 250 connexions (consultation et/ou dépôt de ressources)
Problèmes rencontrés :
Ø difficultés de connexions,
Ø charger des documents sous forme de support papier sur la plate-forme,
Ø envoi de documents sur nos boites aux lettres électroniques,
Ø animation du groupe de travail,
Ø inscription sur la liste de diffusion du groupe.
L'analyse des résultats montre que la participation à la conception
de l'outil des acteurs ne suffit pas, non seulement il faut leur mettre en place
une formation mais il faut aussi les mobiliser pour utiliser l'outil. Ainsi
une des difficultés, l'envoi de documents sur nos boites aux lettres
électroniques, relève après discussions, de l'habitude
des utilisateurs à communiquer par la messagerie électronique
et aussi par crainte de mal utiliser l'outil. De même que la nécessité
d'un animateur de groupe relève aussi des habitudes de fonctionnement
d'un groupe de travail présentiel, il faut que les participants ressentent
une présence et un suivi qui va susciter chez eux une sorte de motivation
à utiliser l'outil.
La poursuite du travail nécessite donc une orientation de recherche
dans des domaines comme la sociologie, l'anthropologie, l'ergonomie. En effet,
tout le travail concernant l'interfaçage entre l'homme et la machine
ne c'est fait qu'autour des besoins exprimés par les formateurs, les
résultats de l'expérimentation montre bien que ce n'est pas suffisant.
La prise en compte des pratiques des formés doit être considérée
pour la suite. L'analyse des pratiques des enseignants lorsqu'ils sont en phase
d'apprentissage dans leur propre formation sera le centre de ce travail de recherche
qui devra aussi prendre en compte la contrainte de faire collaborer enseignants
des disciplines généralistes et enseignants des disciplines techniques
et professionnelles en lycée professionnel.
L'enjeu principal de ce nouveau travail de recherche sur les systèmes
de travail collaboratif est de mettre en place un dispositif de formation continue
des enseignants s'articulant autour de trois volets :
Ø Adaptation de la formation à la demande.
Ø Suivi et accompagnement en cours de formation.
Ø Suivi après la formation.
Prenant en compte l'évolution de plusieurs facteurs tels que:
Les nouveaux programmes, les référentiels, les nouvelles pratiques
d'enseignement, le temps disponible pour se former, l'environnement technologique,
le développement des bases de données dynamiques, la formation
des formateurs, le renouvellement des formateurs.
Cela tout en assurant un lien entre formateurs, formés, formateurs et
formés, et en diffusant l'information à une plus large population,
enseignants en situation, chef de travaux etc.
On distingue alors deux grands domaines, le domaine privé ou réservé
et le domaine public ouvert à tous.
Pour le domaine public, nous avons déjà développé
des moyens de communication, citons par exemple nos serveurs WEB.
Pour le privé, les expérimentations nous montrent que nous devons
distinguer deux parties, la première, concerne les formateurs, la seconde
les formés.
En effet, d'après les retours d'expérimentation, l'espace de travail
des formateurs doit pouvoir rester un espace privatif où ils peuvent
collaborer en confiance. Cette plate-forme de travail collaboratif. Celui-ci
supporte aussi les bases de données nécessaires au partage de
l'information entre formateurs.
En ce qui concerne les formés, on doit pouvoir leur offrir un espace
similaire mais sur lequel les formateurs doivent intervenir pour jouer leur
rôle d'interlocuteur privilégié. Ce sont ces espaces réservés
aux formés qui serviront de support aux échanges entre formateurs
et formés.
Le schéma ci-dessous permet de mieux visualiser l'architecture de cette
nouvelle organisation.

Bibliographie
· Comtet I., (1999) - Systèmes collaboratifs et acteurs professionnels
en réseau de communication, Thèse de doctorat de Sciences de l'Information
et de la Communication, Université Panthéon-Assas, Paris II.
· Chen, (1990) - Chen H., Dhar V. - User misconceptions of online information
retrieval systems - International journal of man-machine studies, N"32,
Vol.6, 1990.
· Davis G, (1985) - Davis G., Olson M. - Management information systems.
Conceptual foundations, structure and development - 2 nd ed, Mc Graw Hill, 1985.
· Giraud E, (2000) - E. Giraud, A. Berton - Système expérimental
pour la gestion des connaissances et du savoir - Rapport interne IUFM - UNIMECA
- 2000.
· Grudin, (1988) - Grudjn J. - Why CSCW applications fail, problems in
the design and évaluation of organizational interfaces - Proc. Conference
on Computer-Supported Cooperative Work, CSCW'88, Portland, 1988.
· Hackathorn, (1997) - Hackathorn R. - Publish orperish - Byte, No 52,
1997.
· Holtz S, (1996) - Holtz S. - The intranet advantage - Macmillan Computer
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· Jaeger C, Rallet A, (1990), Les réseaux professionnels : flexibilités
et rigidités, Réseaux, n°41, Cnet, Paris.
· Jordan, (1997) - Jordan J. - Competing trough Knowledge : an introduction
Technology analysis and strategic management, Vol. 9 , N04 , 1997 , pp. 379
390
· Mintzberg, (1983) - Mintzberg H., The nature of managerial work - Harper
and Row, New-York Press, 1983.
· Mosvick, (1986) - Mosvick R. & Nelson R. - We ave got to start
meeting like this : a guide to successful business meeting management - Scott
Foresman & co., 1986.
· Ranucci JF, (2001) - Elaboration de contenus de formation au travers
d'une plate forme de travail collaboratif - Mémoire de DEA en sciences
de l'information et de la communication, veille et intelligence compétitive,
Université Aix - Marseille.
· Stenmark D, (1998) - Stenmark D. - ldentifying Problems with Email-based
Information Sharing - Proceedings of IRIS21, Department of Computer Science,
Aalborg University, Denmark, 1998.
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