La 6ème Biennale

Contribution longue recherchée

Atelier : En quoi la 'maƮtrise' de l'information est-elle au service de la connaissance ?


Titre : La didactique technologique : un champ en chantier
Auteurs : LITWIN Edith

Texte :

La didactique technologique: un champ en chantier

1. Présentation

A l’Université de Buenos Aires, nous menons une recherche ayant pour objet l’étude des classes des enseignants et les matériels pour l’enseignement qu’ils produisent lorsqu’ils utilisent de nouvelles technologies. Nous étudions aussi bien les pratiques des enseignants universitaires des différentes disciplines qui les utilisent volontairement, que celles de ceux qui sont obligés de le faire étant donné leur participation dans un cours à distance. Dans ce dernier cas, on parle des enseignants qui produisent des matériels pour la WEB ou bien qui font des classes par téléconférences.

Nous plaçons cette recherche dans le champ de la didactique technologique conçue comme une discipline ayant pour objet l’étude des pratiques de l’enseignement médiatisé par les nouvelles technologies. Il s’agit d’une recherche à caractère interprétatif ayant pour objet la construction de nouvelles catégories théoriques pour conformer le champ de la didactique technologique, en tant que champ en formation. Par conséquent, cette recherche ne vise pas l’étude de l’impact des nouvelles technologies dans l’enseignement mais la compréhension et l’interprétation de ces pratiques-là dans les contextes les incluant. *

2. Les référents théoriques

Tout le long de notre recherche nous nous sommes demandé quelle est la place que nous octroyons à l’éducation face à l’impact des nouvelles technologies. Si le fait d’être alphabétisé implique aujourd’hui d’être alphabétisé pour la vie de tous les jours, pour lire le journal ou de la littérature, évidemment implique aussi être alphabétisé pour utiliser les technologies en tant que des outils à frayer l’accès à de nouveaux savoirs. Et si le rôle des technologies est celui de nous permettre d’accumuler et d’avoir accès à de grosses masses d’informations , toutes avec un format similaire, et toutes ayant un sens particulier en fonction des contextes spécifiques des disciplines fournissant ces informations, le rôle de l’éducation est celui d’apprendre à construire des critères servant à apprécier cette information, à en faire une sélection et à la comprendre dans le cadre des disciplines la validant.

Le cadre interprétatif de départ pour analyser les pratiques depuis cette perspective s’est inscrit dans des études sociales et politiques, dans des dérivations de la psychologie cognitive , la lingüistique, la psychologie culturelle et les études didactiques.

En politique éducative nous nous sommes reportés tout particulièrement aux travaux de A. Hargreaves, T. Popkewitz et M. Fullan. Les études sociologiques, communicationnelles et politiques de Castells et Dominique Wolton , parmi les

référents principaux, ont été fondamentales à l’heure d’analyser l’inclusion des nouvelles technologies dans la société et dans la culture, en particulier les processus avertissant à propos de l’accès à l’information ou aux solitudes interactives. De même que celles de N. Burbules, pour comprendre leur inclusion dans l’éducation d’après la maîtrise ou la transparence de ces technologies que les enseignants possèdent.

Nous avons adopté les catégories de résidu cognitif de Salomon, Globerson et Perkins; nous avons étudié les narrations se produisant dans les classes depuis une perspective brunérienne, depuis la nature narrative du savoir pédagogique de Gudmundsdottir ou bien des inférences d’Egan¸ ainsi que les apports de Landow pour analyser les narrations hipertextuelles, et, en ce qui concerne la place de la narration et de ses implicites, de P. Jackson.

Nous avons analysé les pratiques des enseignants tenant compte de l’apport substantif de Chaiklin et Lave en ce qui concerne l’apprentissage des métiers et des professions; et dans le champ de la didactique nous avons étudié tout particulièrement les travaux de Selma Wassermann, au moment d’introduire le travail des cas pour favoriser les processus compréhensifs.

3. Questions qui ont orienté notre travail de recherche

Nous nous sommes posé les questions suivantes:

- Les pratiques de l’enseignement, donnent-elles naissance à des propositions technologiques octroyant aux outils de nouvelles possibilités pédagogique-didactiques?

- Quelles caractéristiques possèdent-elles, les bonnes pratiques de l’enseignement médiatisées par les technologies?

- Est-ce qu’elles imposent à la technologie des conditions d’un nouveau type?

4. Métodologie

Notre travail de champ s’est développé dans deux cadres d’étude bien différenciés: D’une part, on a analysé les questions ou les demandes des enseignants qui ont sollicité de l’assistance didactique -technologique puisqu’ils doivent faire des classes ou concevoir des matériels en utilisant de nouveaux outils, supports ou médiations technologiques : faire des téléconférences ou écrire des matériels d’enseignement pour la WEB. D’autre part, on a observé , enregistré et analysé des classes , et on a interviewé des enseignants qui utilisaient de diverses technologies dans leurs propositions d’enseignement.

Dans cette recherche ont participé, au niveau de groupes et individuel, et au niveau des matériels produits, 48 professionnels de l’enseignement supérieur d’Universités Publiques Argentines diverses.

A notre avis, les réunions de travail avec les enseignants ont constitué la scène priviliegiée de la recherche didactique, sur laquelle sont devenues possibles - et se sont matérialisées- de multiples collaborations, à l’heure de construire les nouveaux apports théoriques, et non seulement à l’occasion du processus de validation de leurs résultats.

5. Les résultats

Dans notre investigation, nous avons pu vérifier que, dans le cas de production des matériels , la proposition didactique diffère totalement selon la maîtrise des technologies propre à chaque enseignant. Nous avons constaté que les enseignants acquièrent un “résidu cognitif didactique”au cas où leur préoccupation pour le nouveau support - tel le cas des téléconférences- les pousse à demander de l’orientation pour leurs classes. Les savoirs acquis en fonction de leur demande ont permis de reconnaître de nouveaux savoirs pour leur enseignement. Dans d’autres cas, les enseignants donnent lieu à une ambiance opposée à leur usage, dans leurs propositions de pratique. Il s’agit d’enseignants qui dessinent des matériels se servant de cas ou de traitements hipertextuels. Quand ils construisent des cas, ils ont peur que les élèves ne comprennent que le cas n’est qu’un recours limité ou particulier de comprendre la théorie, et, dans la suite des activités, ils proposent une rupture avec le même cas. C’est dire qu’ils dé-centrent ce que le cas avait centré. En ce qui est des hypertextes la peur des enseignants est que les élèves égarent, à cause de la navigation, leur sens sur ce qui est central dans le champ de la discipline, et ils leur offrent des propositions didactiques qui re-centrent ce que l’hypertexte a dé-centré.

Résidu cognitif didactique, dé-centration ou bien re-centration constituent donc de nouvelles catégories d’étude dans le champ de la didactique technologique.

La technologie transparente (catégorie inspirée par Burbules quand il reconnaît que la familiarité envers les technologies les rend invisibles **) a fait possible, dans d’autres circonstances, de renforcer la puissance des propositions pédagogiques. Il s’agit des propositions pédagogiques qui s’enrichissent grâce à l’inclusion de ces technologies. Elles sont construites par des enseignants qui comprennent le développement des hypertextes et ne craignent que les élèves y fassent naufrage. Dans des circonstances pareilles, ils posent des situations d’apprentissage d’une grande valeur.

D’autres emplois des nouvelles technologies dans les classes nous ont permis d’identifier des adoptions technophiles s’étant tout court inscrites dans le sens d’illustrations. Il s’agit d’emplois servant à élargir le savoir mais qui sont dévalorisés par l’enseignant lui-même à l’heure de comparer la valeur de traiter le même objet du savoir avec l’illustration qu’il propose. Nous avons pu reconnaître comme ayant le même sens technophilique à un processus de banalisation dans le développement des contenus, particulièrement à cause de l’utilisation du Power Point qui a imposé un traitement des sujets ayant un sens classificatoire très fort en dehors de la discipline dont il s’agit.

Nous appelons technologie “silencieuse” aux situations où la valorisation du matériel propre au support technologique est bien haute pour l’enseignant. Il s’agit d’oeuvres de la littérature universelle, de films, de téléconférences d’experts. Dans ces cas-là, les enseignants affirment qu’il est préférable de “laisser parler le matériel”. Et nous appelons technologie “silenciée ou niée”, au contraire, à celle où le matériel sert de pont pour un propos différent. Les enseignants refusent de traiter leur contenu ou leur approche et ils affirment qu’elle sert à développer des façons de penser ou bien des adresses cognitives.

6. Discussion

La conformation du champ de la didactique technologique semble se construire, contrairement à celui de la technologie éducative, parce que l’inclusion des nouvelles technologies a montré qu’il ne s’agit pas d’un recours quelconque mais d’un changement substantif concernant les propositions d’accès au savoir, l’information, la communication, la vie et le travail. Pourtant, les enseignants méconnaissent ses possibilités, ses caractéristiques, son mode d’emploi ou sa puissance. Donner forme à un champ incluant des catégories interprétatives y partant donne un sens différent à son caractère provisoire.

D’autre part, si la technologie éducative a toujours subi l’impact des mass-médias (presse, radio ou télévision), nous nous demandons si l’existence de la didactique technologique en tant qu’un nouveau champ n’est pas due au fait qu’elle utilise une technologie puissante par son impact mais non pas massive.

7. Conclusions

Les enseignants apprennent didactique quand ils demandent de l’aide à cause de leur préoccupation ou de leur méconnaissance concernant les supports ou les formats technologiques. Ces apprentissages nous les appelons “résidu cognitif didactique”, ce qui résulte d’une nouvelle capacité acquise par le fait d’opérer les nouvelles technologies. Les enseignants engendrent aussi, et par méconnaissance, des traitements didactiques en opposition aux technologies: re-centration dans les hypertextes ou bien dé-centration dans les cas. Il s’agit de la création de milieux contraires à leur emploi. Par méconnaissance aussi, ils peuvent adopter les technologies et banaliser les approches du contenu. En somme, ils conçoivent la technologie comme outils, en font usage en tant qu’illustration, passent sous silence les propositions pédagogiques à la valeur du contenu, ou bien, par contre, en renient et en vont au-delà moyennant les activités qu’ils proposent.

D’autres moyens de traitement du contenu, en particulier lorsque la technologie résulte transparente pour l’enseignant, nous ont permis de reconnaître son utilisation pour rendre plus puissantes les propositions pédagogiques.

* L’investigation synthétisée dans cette présentation: “Les pratiques de l’enseignement et les nouvelles technologies dans le débat didactique contemporain” est menée grâce à un subside de l’Université de Buenos Aires, et elle a lieu dans l’Institut de Recherches en Sciences de l’Education de la Faculté de Philosophie et Lettres.

** Cf. Burbules N. et Callister T. (2001): “Educación: riesgos y promesas de las nuevas tecnologías” (Education: les risques et les promesses des nouvelles technologies). Barcelonne: Granica. Page 13.


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