Le Centre de Recherche Educative à Athènes nous a demandé
d'effectuer pour le Ministère de l'Education Nationale une étude
des systèmes de certification en langues étrangères dans
les pays de l'UE et plus spécifiquement d'explorer les systèmes
de certification qui aboutissent à la délivrance de certificats
nationaux.
L'objectif de cette étude est double :
1) Faire un état des lieux des modes de certification en langues étrangères
par des organismes internationaux
2) Décrire les conditions de délivrance des certificats nationaux
en langues étrangères instituées par certains pays de l'UE.
Une étude systématique de la bibliographie française, anglaise
et grecque concernant l'organisation des systèmes de certification nous
a conduite au constat que ce sujet n'a pas, jusqu'à présent, constitué
l'objet spécifique d'une recherche. Ce fait est lié notamment
a deux difficultés. D'une part, la difficulté de la délimitation
de ce sujet en un objet d'étude étant donné qu'il réunit
en même temps divers objets de recherche : la didactique des langues étrangères,
l'évaluation des personnes et des actions, l'ingénierie de la
formation, la politique éducative. D'autre part, la difficulté
de l'élaboration d'une approche spécifique étant donné
que l'étude d'un tel sujet imbrique l'analyse systémique, institutionnelle
et linguistique avec l'analyse économique et sociologique de l'éducation.
A ces difficultés on doit ajouter celles qui sont propres à l'approche
comparative des systèmes éducatifs.
En effet, procéder à une étude comparative des systèmes
éducatifs de l'UE n'est certainement pas une entreprise sans écueils.
De nombreux auteurs attirent l'attention sur les enjeux méthodologiques
d'une analyse comparée vu que dans l'étude de systèmes
changeants comme le sont les systèmes éducatifs, il est difficile
de trouver, selon les comparatistes, une unité de comparaison stable.
De même, il est difficile de trouver des repères identiques unanimement
admis pour identifier un état ou une situation.
Certes, notre étude ne saurait négliger les difficultés
précitées. Elle y a été confrontée tout au
long de son déroulement et elle a cherché à procéder
à une délimitation rigoureuse de son objet (étude exclusive
des institutions qui s'impliquent dans le système de certification et
du type des certificats délivrés ) et de son champ d'application
(les pays de l'UE et particulièrement les pays qui délivrent des
certificats nationaux en langues étrangères). Aussi, s'est - elle
attachée à une approche fondée sur une analyse qualitative
transversale des données de pays parmis lesquels existent des analogies
concernant les questions qu'on examine et des réponses institutionnelles
que chaque pays y a apportées. Les données de notre recherche
ont été recueillies au moyen notamment d'une recherche documentaire
dans des sites officiels de l'Internet (Ministères de l'Education Nationale,
Commission européenne pour l'éducation et la culture, organismes
internationaux de certification : l'A.L.T.E., l'I.C.C.)
Dans le texte qui suit nous restituerons les principales conclusions de cette
recherche et nous tâcherons de dégager certaines pistes de réflexion
pouvant permettre une meilleure compréhension des tendances qui régissent
les systèmes de certification en langues étrangères.
Principales conclusions de la recherche
En effectuant une pre-enquête dans le réseau " Eurydice",
nous avons constaté que dans tous les pays de l'UE (à l'exception
de la Grèce), c'est l'école qui se charge de l'apprentissage et
de la certification des langues étrangères dans l'enseignement
secondaire. En effet, le baccalauréat est reconnu également comme
un certificat de la connaissance de la langue enseignée. Cependant, dans
les pays de l'UE, il existe des systèmes de certification en langues
étrangères qui fonctionnent avec le concours des organismes internationaux,
des institutions éducatives, des instances publiques et des autorités
nationales. Ces systèmes de certification mettent en place des certificats
que nous avons classés en trois grandes catégories d'après
l'instance qui les délivrent :
1) Les certificats en langues étrangères qui sont délivrés
par les institutions éducatives spécialisées en langues
et reconnues par l'A.L.T.E. (Association of Language Testers in Europe)
2) Les certificats qui sont délivrés par l'I.C.C. (International
Certificate Conférence)
3) Les certificats qui sont délivrés par les Ministères
de l'Education de chaque pays.
Par ailleurs, notre recherche met en évidence trois tendances qui régissent
les systèmes de certification des langues étrangères en
Europe :
1. L'institution des conditions et des modes de certification en langues étrangères
internationaux
2. La redéfinition du rapport certification-formation
3. Le développement des certificats nationaux
1. L'institution des conditions et des modes de certification internationaux
en langues étrangères
Tous les pays de l'UE sont impliqués dans un système international
de certification des langues soit au niveau des langues nationales des pays
(A.L.T.E.) soit au niveau des langues étrangères (I.C.C.).
L'A.L.T.E. et l'I.C.C. sont des organismes internationaux qui visent à
l'amélioration de la qualité des méthodes de certification
et des méthodes d'apprentissage. Etant impliqués à la délivrance
des certificats en langues étrangères, ils cherchent à
établir des conditions homogènes de certification des connaissances
en langues étrangères afin que leurs certificats en langues soient
reconnus par les pays de l'Europe.
Le développement d'un système international de certification des
compétences linguistiques ne vise pas seulement à l'amélioration
de la communication mais il cherche à favoriser le développement
des échanges économiques, la libre circulation des citoyens européens
sur le marché du travail et l'échange culturel. Dans cette perspective,
la certification s'appuie sur un système d'évaluation qui définit
les indicateurs et les critères des compétences linguistiques
afin de rendre les conditions de certification autant que possible homogènes
et transparentes. De cette manière s'institue une reconnaissance commune
du niveau linguistique mentionné sur le diplôme délivré.
2. La redéfinition du rapport certification-formation
Bien que l'organisation de la formation continue diffère d'un pays à
l'autre, les rôles que cette formation doit assumer dans les nouvelles
données économiques, sociales et culturelles semblent être
communs. Ceci est également valable pour la formation continue dans le
domaine des langues étrangères.
Cette formation qui se développe en réseau vient jouer un rôle
régulateur entre la validité de la certification à visée
professionnelle et les besoins du marché du travail et notamment du marché
local du travail. Ce rôle régulateur de la formation semble se
réaliser par l'organisation des programmes de formation " à
la carte" qui s'effectuent dans le cadre des conventions signées
entre un centre de formation et une entreprise publique ou privée ou
entre un salarié et son entreprise. Dans ce cadre de formation, laquelle,
l'individualisation du processus de formation gagne de plus en plus de terrain
s'effectue par la mise en place des pédagogies qui favorisent le travail
autonome et l'accompagnement de la personne à son processus d'autoformation.
3. Le développement des certificats nationaux
Certains pays de l'UE (La France, la Finlande, l'Espagne et la Grèce))
même s'ils reconnaissent le système internationalisé de
certification des langues et même s'ils y participent sont, toutefois,
amenés à mettre en place des certificats nationaux en langues.
Dans ce cadre, l'organisation des examens s'effectue sous la responsabilité
de certains centres d'examens qui sont sous la tutelle des services du Ministère
de l'éducation de chaque pays. Bien que, dans le contexte socioculturel
actuel, la validité de la certification pèse lourd, néanmoins
elle ne constitue pas le facteur déterminant de la valeur de la certification.
On pourrait même dire que c'est la certification des compétences
déterminées par le monde du travail qui déterminera la
validité du certificat délivré et qui garantira la valeur
de la certification.
En effet, tant les systèmes de formation que les systèmes de certification,
dans le contexte actuel, ne peuvent pas ne pas tenir compte des besoins du marché
de travail mondial. Néanmoins, ces besoins du marché du travail
ne coïncident pas toujours avec les besoins du marché local du travail.
Notre analyse a montré que l'institution des certificats nationaux dans
ces quatre pays de l'UE constitue une réponse de la politique de la formation
aux besoins du marché local du travail. Par conséquent, le certificat
national en langues étrangères semble certifier des compétences
linguistiques qui sont liées au recrutement et à l'évolution
du poste de travail. Dans ce sens, on peut dire que celui qui possède
un certificat national possède un certificat "à la carte"
qui est en plus soutenu par l'instance qui le délivre.
En terminant, on pourrait signaler que le développement du marché
unique européen a renforcé l'enseignement des langues étrangères
qui sont le plus parlées dans les pays de l'UE en améliorant la
qualité de cet enseignement. Cependant, selon les directives de la Commission
le développement des compétences linguistiques doit être
lié avec le développement de l'échange économique,
le renforcement de la cohésion sociale et l'élargissement de la
culture. Par conséquent, la certification en langues étrangères
devient un facteur régulateur du système éducatif des pays
de l'UE par rapport aux enjeux économiques, sociaux et culturels. Cependant,
une question reste ouverte, à savoir si la certification arriverait à
trouver finalement les modes de régulation qui lui permettraient d'assurer
un développement équitable entre l'économie, la société
et la culture et si finalement le rapport des langues étrangères
avec le développement des attitudes du citoyen européen du futur
ne serait pas simplement associé à un idéal c'est-à-dire
à une intention qui n'a pas d'ancrage dans la réalité.
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