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Ecoles
dEurope en Hesse, un vaste modèle innovatif
Etude de cas
Texte de Christoph
KODRON, Horst
KUHLEY, Christian
KUBINA , Pays : Allemagne.
Thème : Apprentissage des langues, médiation culturelle et formation à la
dimension européenne. Résumé Descripteurs : |
1 Choix du sujet,
auteurs, Land de Hesse 1.1 Choix du modèle des "Ecoles dEurope en Hesse" [Europaschulen in Hessen] 1.2 Auteurs de lenquête 1.3 La Hesse et son système scolaire |
2 De lidée à
lappel doffre 2.1 De lidée au programme ministériel 2.2 Rapports du programme avec les centres dintérêt de lObservatoire |
3. Modèles innovatifs en Hesse et
appel doffre en tant que nouveau modèle 3.1 Innovations de type top-down" (par décret den haut) 3.2 Innovations de type "bottom-up" (par la base) 3.3 Evolution de linnovation par la pratique 3.4 Lappel doffre en tant que nouveau modèle |
4. Pilotage et suivi
scientifique 4.1 Pilotage par les instituts HIBS et HILF 4.2 Suivi scientifique par un expert étranger |
5. Innovations sur le fond et la structure dans les Ecoles dEurope |
6. Problème des écoles associées |
7.
Effet et force dattraction du modèle sur dautres écoles |
8. Réalités et perspectives de linnovation |
9. Glossaire | 10. Bibliographie complémentaire |
1. Choix du sujet, auteurs, Land de Hesse
1.1. Choix du modèle des "Ecoles dEurope en Hesse" [Europaschulen in Hessen]
Les "Ecoles dEurope en Hesse" ont été choisies comme exemple dinnovation pour les raisons suivantes :
elles représentent une forme intéressante dinnovation aussi bien sur le plan des idées que sur celui de la structure,
elles concernent divers types décole et denvironnement (grande ville, petite ville, commune rurale)
elles couvrent en outre plusieurs des champs dactivités définis par lObservatoire, en particulier lacquisition des langues étrangères", le projet européen" et la formation de personnes-clés pour les projets européens".
Il faut toutefois signaler quil sagit là dun projet innovatif global dont la conception et la réalisation couvrent plusieurs plans et qui de plus demande à toutes les écoles participantes de trouver la forme la mieux adaptée à son environnement sur le plan du fond comme de la structure. Cette diversité rend le sujet difficile à saisir dans un bref rapport ; dautre part, lobligation de se concentrer sur des traits communs ne rend pas compte de labondance des réponses et des solutions originales.
Les auteurs de cette enquête ont des horizons professionnels divers et travaillent dans différents organismes situés en Hesse.
Christoph Kodron est sociologue et collaborateur scientifique au Département de Pédagogie Générale et Comparée" [Abteilung Allgemeine und Vergleichende Erziehungswissenschaft] de lInstitut Allemand de Recherche Pédagogique Internationale" [Deutsches Institut für Internationale Pädagogische Forschung (DIPF)] à Francfort sur le Main ; il y est responsable des questions européennes et de la formation des enseignants et a participé en partie au projet-pilote des Ecoles dEurope depuis son lancement.
Le Dr. Christian Kubina est collaborateur de lInstitut Hessois pour la Planification de lEducation et le Développement Scolaire" [Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung (HIBS)] ; il y dirige le champ dactivités Avancement du Cycle Secondaire Inférieur" [Weiterentwicklung der Sekundarstufe I]. Il a enseigné de 1970 à 77 dans une école polyvalente [Gesamtschule] de Berlin et a été chargé de cours à la Freie Universität Berlin de 1977 à 85 ; son domaine principal y était Histoire de lEcole et Politique Culturelle" [Schulgeschichte und Bildungspolitik].
Horst Kuhley a enseigné dans une école polyvalente de Hesse jusquà lété 1996 ; il est actuellement membre du conseil dune Ecole dEurope et depuis 1996 collaborateur de lInstitut Hessois pour la Planification de lEducation et le Développement Scolaire" [Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung (HIBS) où il est responsable du service Projets de Développement Scolaire" [Schulentwicklungsprojekte] et chargé entre autre du pilotage des Ecoles dEurope.
Chacun dentre nous a contribué au rapport en y apportant son expérience. Nous avons utilisé les publications existantes ou en cours de préparation. De plus, nous avons effectué des entretiens avec le responsable du Ministère de lEducation de la Hesse, plusieurs collaborateurs à des projets semblables dans dautres Länder, des directeurs détablissements scolaires et un grand nombre denseignants dans des Ecoles dEurope et Ecoles dEurope associées. Nous avons tenté détablir un rapport multidisciplinaire en considérant divers aspects sans pouvoir répondre à toutes les questions qui se posaient. En dépit de quelques divergences de points de vues ou de pondération des aspects, nous sommes tous les trois responsables du rapport.
1.3 La Hesse et son système scolaire
La Hesse se situe au centre-ouest de lAllemagne ; cest un des 16 Länder de la République Fédérale dAllemagne (R.F.A.). Avec ses quelques 5,5 millions dhabitants, la Hesse est à peu près comparable au Danemark (5,15 millions) ; toutefois, sa superficie nest que de 21.114 km², cest-à-dire environ la moitié de celle du Danemark (43.092 km²). Avec 281 habitants au km², la Hessen fait partie des régions à haute densité de population, aussi bien pour lAllemagne que pour lUnion Européenne (U.E.).
On peut faire une division grossière des écoles de la façon suivante : le cycle primaire, qui comprend les écoles primaires [Grundschulen] pour les classes 1 à 4 ; le premier cycle secondaire, qui comprend les écoles à cycle court [Hauptschulen] pour les classes 5 à 9, les collèges [Realschulen] pour les classes 5 à 10, le cycle inférieur des lycées [Gymnasien] et les écoles polyvalentes coopératives ou intégrées [kooperative oder integrierte Gesamtschulen] pour les classes 5 à 10 ; le deuxième cycle secondaire, qui comprend les classes 11 à 13 des lycées [gymnasiale Oberstufe] et les écoles professionnelles [Berufsschulen] à partir de la classe 9 ; enfin divers types détablissements déducation spéciale [Sonderschulen]. Lensemble du système scolaire est placé sous la tutelle de lEtat ; 95 % des écoles se trouvent sous la tutelle de communes ou de districts régionaux ; parmi les écoles à instance de tutelle privée [Privatschulen], les écoles confessionnelles représentent la majorité. La plupart des enseignants sont fonctionnaires du Land.
La structure scolaire et les traditions montrent encore actuellement que la Hesse se compose de trois parties historiquement distinctes et quelle na été créée sous sa forme actuelle quaprès la Seconde Guerre Mondiale. Sans doute aussi du fait des traditions différentes dont il est issu, le système scolaire de la Hesse présente une grande diversité de structure et de fond, même lorsquon le compare à celui dautres Länder de la R.F.A..
Depuis les années cinquante, le Ministère de lEducation de la Hesse est entre les mains du SPD (parti social-démocrate), excepté un intermède de 1987 à 1991 où un membre du CDU (parti chrétien-démocrate) était ministre. Depuis 1991, le Land est gouverné par un gouvernement de coalition formé par le SPD et ALLIANCE 90 / LES VERTS [BÜNDNIS 90 / DIE GRÜNEN].
Ladministration scolaire de la Hesse présente actuellement trois plans : le Ministère, la Division Administrative [Regierungspräsidium] et lInspection Académique [Staatliches Schulamt]. Le plan intermédiaire, celui des Divisions Administratives, va disparaître à lété 1997. Les districts [Landkreise] ou les communes [Gemeinden] sont généralement les instances de tutelle des établissements ; en tant que tels, ils ont un droit dintervention quant aux installations et aux modifications de structure et ils paient les frais courants pour lentretien des bâtiments et locaux.
La Hessen avait au total en 1996/97 environ 2.100 écoles, dont environ 1.000 écoles secondaires de culture générale, et à peu près 44.000 enseignants. Depuis 1992, le système scolaire hessois possède un cadre juridique relativement uniforme, la Loi Scolaire de la Hesse [Hessisches Schulgesetz]. Un amendement est actuellement en cours de préparation ; il doit entre autre accorder plus dautonomie aux écoles et élargir le cadre de responsabilités des chefs détablissement.
Un nouvel organe institué en 1992, la Schulkonferenz, est composée pour le secondaire du chef détablissement, qui en est le président, et pour moitié denseignants dun côté et délèves et de parents délèves de lautre, tous élus par leurs pairs. Cet organe prend pour lécole toutes les décisions qui ne tombent pas sous le coup de la loi ; il décide par exemple des horaires journaliers des cours, des accents à mettre sur certaines matières et dans la vie de lécole et des animations en dehors des cours. Le conseil du personnel, composé de représentants élus des intérêts des enseignants (à divers niveaux), possède des droits de cogestion, de même que les représentants des élèves et des parents délèves, élus séparément et à plusieurs niveaux.
2. De lidée à lappel doffre
2.1 De lidée au programme ministériel
Lidée de lEcole dEurope" en tant que nouveauté est née au moment même où les sociaux-démocrates (SPD) et les Verts perdaient la majorité aux élections au Landtag de 1987. Cet échec nétait pas sans rapport avec le vote par le Landtag juste avant les élections de la loi instituant la création de classes dorientation partout en Hesse, ce qui permit aux chrétiens-démocrates (CDU) et au parti libéral (FDP) de faire des controverses publiques sur ce sujet un des thèmes principaux de leur campagne électorale et de raviver les luttes de lépoque de la première réforme du système éducatif quant à lécole polyvalente [Gesamtschule] et à la révision des curricula, cette fois sous le slogan Les classes dorientation obligatoires préparent la voie au type unique décole".
Face à cette analyse, le SPD et les Verts parvinrent séparément à deux conclusions susceptibles de compromis :
1. Le développement scolaire futur devait se faire essentiellement sur une base facultative (donc en tant que possibilité pour les écoles et instances de tutelle intéressées) ; il ne devait plus y avoir dordonnance venant den haut et instituant une structure donnée telle que les classes dorientation ou lécole polyvalente, mais une humanisation et une évolution permanente de lécole destinée à répondre aux exigences globales de la société actuelle et adaptée aux besoins des enfants, des adolescents et des parents. (cf. Was sollen Kinder in der Schule lernen" [Que doivent apprendre les enfants à lécole], 1991)
2. Aussi nétaient-ce pas des conceptions générales qui devaient animer la réforme du système scolaire, mais les objectifs dune pédagogie de diversité" touchant plus ou moins tous les cycles scolaires et tous les types décoles.
Lidée des Ecoles dEurope" était un concept de ce genre qui était né au sein du groupe de travail Education" des Verts (die Grünen) en Hesse et était ensuite devenu partie intégrante du programme des Verts pour les élections de 1991 au Landtag.
Les électeurs ayant redonné au SPD et aux Verts la majorité aux élections de 1991, ce fut en particulier le porte-parole des Verts en matière déducation qui réussit à faire adopter un passage correspondant dans le programme de gouvernement au cours des négociations de coalition. Ceci devait permettre aux Verts dacquérir un profil en politique déducation bien que le ministère restât sous la direction dun social-démocrate. Les négociations ne furent pas faciles car les sociaux-démocrates favorisaient plutôt les programmes danimation pour laprès-midi, lexpansion des écoles proposant des cours le matin et laprès-midi et louverture de lécole sur la commune. Le compromis conclu prévoyait de commencer par choisir cinq écoles destinées à développer ce nouveau concept davancement quant au fond. En même temps, une somme de un million de DM était inscrite au budget de 1992 pour ce programme. En bref, il sagissait là de créer une école implantée dans son site et orientée sur le plan éducatif vers les exigences dune Europe unie (cf. Commission des Communautés Européennes 199 ; Lernen für Europa" [Apprendre (pour) lEurope]1995, Enseigner lEurope dans nos sociétés multiculturelles"1995).
Lappel doffre publié au Journal Officiel du Gouvernement de la Hesse décrivait en résumé les conditions que les écoles devaient remplir pour participer au programme des Ecoles dEurope en Hesse". Ces conditions étaient les suivantes :
1) Développement de la Dimension Européenne et de lapprentissage interculturel dans lenseignement et la vie scolaire et élaboration dun curriculum propre à lécole ; intensification des séjours à létranger des élèves ; coopération et échanges avec des écoles et des organismes étrangers ;
2) Ouverture de lécole sur la commune et le quartier selon le principe de lécole de proximité (Community Education) ;
3) Institution de programmes danimation pour laprès-midi sur une base facultative avec laide dorganismes privés prêts à collaborer avec lécole ;
4) Orientation de lenseignement vers une pédagogie de réforme [Reformpädagogik] et expérimentation dans ce sens ;
5) Développement dun centre dintérêt éducation écologique".
Le succès" de lappel doffre dépassa toutes les espérances. Au total, 31 écoles firent acte de candidature pour participer à ce nouveau programme qui passait - à juste titre - pour un projet des Verts aux yeux des enseignants. Le plus étonnant est le fait que des écoles de tous les types existants du premier et second cycle secondaire et de plus quatre écoles à instance de tutelle privée [Privatschulen] se trouvaient parmi les candidates. La sélection (tout comme le déroulement ultérieur du programme) a été supervisée au Ministère par un nouveau chef de service embauché à cet effet. Il avait pour tâche détablir des critères permettant une sélection judicieuse et assurant que les écoles choisies seraient à même de représenter le projet-pilote de façon satisfaisante. Il fallait en particulier permettre une extrapolation à dautres écoles. Pour cette raison, le nombre des écoles participant au projet global a été complété par 14 Ecoles dEurope associées" (Europaschule in Hessen 19942, p. 89-111) destinées à profiter de lexpérience des 5 Ecoles principales" [Kernschulen], dont le budget était nettement supérieur.
Les cinq écoles principales choisies étaient des écoles polyvalentes additives" [additive Gesamtschulen] (aujourdhui appelées : coopératives"), cest-à-dire des écoles où les trois types de premier cycle secondaire (cycle court [Hauptschule], collège [Realschule] et lycée [Gymnasium]) se trouvent réunis sous le même toit et sont unis par la jointure" formée par des classes dorientation plus ou moins intégrées (classes 5 et 6, cest-à-dire première et deuxième année de secondaire). Du côté des écoles associées, moins bien nanties sur le double plan financier et théorique, les écoles polyvalentes additives représentaient également la majorité. Quelques écoles polyvalentes intégrées" [integrierte Gesamtschulen] (enseignement commun à tous les élèves dune classe pour les matières principales, différentiation suivant le niveau en anglais, allemand et mathématiques), deux lycées et une école professionnelle faisaient également partie du lot.
Dès la publication en mars 1992 des écoles sélectionnées par le ministre de léducation de la Hesse, M. Holzapfel (SPD), les comités de planification [Planungsgruppen] se sont mis au travail pour élaborer des programmes. Avec laide du HIBS et du HILF (voir glossaire, chapitre 9), une première concrétisation des cinq thèmes principaux a eu lieu au cours de trois congrès destinés à fixer les grandes lignes. Avec le choix du Professeur Gordon Bell, Bretton Hall College, University of Leeds, pour le suivi scientifique du processus dinnovation, ces réflexions ont permis détablir pour chacune des écoles un vaste programme dinnovation qui ne définissait pas seulement les aspects théoriques des cinq critères initiaux mais aussi les changements dans la structure des écoles concernées et lavancement personnel des enseignants (cf. aussi Bell, 1989) en tant quobjectifs stratégiques.
Après la confirmation de la coalition SPD/Verts aux élections au Landtag de 1995, les partenaires sont convenus détendre le programme des Ecoles dEurope". Trois autres écoles principales" et 11 autres écoles associées" ont été sélectionnées. Le financement a été considérablement augmenté, portant à un total de 10 % le supplément de personnel et de matériel quelles reçoivent.
Ce sont donc actuellement huit Ecoles dEurope principales" et 27 Ecoles dEurope associées" qui participent au programme. Pour les cinq premières Ecoles dEurope principales", le suivi scientifique se termine à lété 1998. Cest alors quon pourra voir si le processus de réforme engagé persistera grâce aux modifications intervenues dans les structures internes sans laide ou le corset dune évaluation externe.
2.2 Rapports du programme avec les centres dintérêt de lObservatoire
Il faut tout dabord se demander sil sagit bien dune innovation dans le cas du programme des Ecoles dEurope. Au sens de la définition de lObservatoire (cf. Observatoire Européen des Innovations 1996, p. 15 et 26 ), il sagit bien dune innovation", et ce à plusieurs points de vue. Avant lavènement dun marché commun européen, il faut expérimenter un modèle davenir centré sur lEurope, mais ouvert au monde et simultanément à lenvironnement immédiat de lécole, cest-à-dire qui tienne compte de la composition (multiculturelle) de ses élèves, de leurs cultures et de leurs langues. Lobjectif peut être décrit comme éducation à lEurope".
La nouveauté consistait tout dabord dans le procédé par lui-même : conformément aux accords de coalition, le ministère formula un profil des exigences et des objectifs. Etant donné la procédure dappel doffre choisie, les écoles pouvaient poser leur candidature en toute liberté. Dautre part, lapproche elle aussi était nouvelle : le programme ne stipulait pas exactement par avance les changements anticipés sur la forme et sur le fond, mais permettait dinclure des mesures déjà réalisées, de les modeler dans le sens dobjectifs formulés seulement dans les grandes lignes et délaborer des conceptions pour les perspectives davenir. On voit dans la genèse du modèle quil reflète le jeu de diverses forces au sein de la société qui luttent pour une éducation à perspective davenir. Lune des nouvelles échelles de valeurs sexprime du fait que lécole est considérée comme une entité globale responsable en tant que telle de son avancement futur. Tous les intéressés (enseignants, élèves, parents et habitants des environs) sont appelés à fixer les orientations qui leur paraissent adéquates pour parvenir à un profil européen propre à lécole en question". Aussi bien lapproche globale que les objectifs énoncés signalent une orientation sur des problèmes-clés dactualité à léchelle mondiale (cf. Klafki, 1994).
2.2.1 Amélioration de légalité des chances pour tous les élèves / Mesures contre léchec scolaire
Légalité des chances nest formulée explicitement comme objectif ni dans lappel doffre, ni dans le programme lui-même. Toutefois, il est certain que des cours pendant toute la journée et la présence dune cantine scolaire améliorent les chances en particulier pour les enfants de familles uniparentales ou pour ceux dont lentourage est peu stimulant. Si lon regarde de plus près les programmes des diverse Ecoles dEurope, on voit quils visent à améliorer légalité des chances. Il en est de même des mesures contre léchec scolaire. Le quatrième point de lappel doffre, celui de lorientation vers une pédagogie de réforme, peut être interprété ainsi car les orientations dans ce sens visent toujours à améliorer lenseignement ainsi que ses résultats, par conséquent à réduire les causes déchec scolaire. Il faut cependant souligner que, dans le cadre des discussions actuelles sur la politique déducation en Hesse (et en Allemagne), on parle plutôt davancement individuel" de chaque enfant que dégalité de chances" pour tous.
Dans les programmes de certaines Ecoles dEurope, on trouve aussi les thèmes de légalité des chances et de la réduction de léchec scolaire dans les objectifs formulés et les mesures individuelles, bien que les mesures de promotion" de groupes spécifiques y soient plus fréquentes. Lécole Georg-August-Zinn de Kassel (école polyvalente coopérative) essaie de créer de meilleures possibilité de transition, non seulement en faisant coïncider les heures des cours de mathématiques et danglais de tous les types de secondaire, permettant ainsi aux élèves dassister aux cours du type de secondaire directement au-dessus, mais aussi en utilisant les mêmes matériaux didactiques pour tous les types de secondaire afin de faciliter le passage de lun à lautre, et en essayant détablir un programme denseignement commun à tous les types décole aussi vaste que possible et de proposer de laide sur le plan didactique et éducatif, ainsi que pour lencadrement et le conseil. Comme beaucoup dautres écoles, elle propose aussi une aide aux devoirs laprès-midi (Europaschule in Hessen, 1994, p. 50 et 52). Lécole Freiherr-vom-Stein de Gladenbach (école polyvalente coopérative) énonce expressément lidée dégalité en matière de chances dinstruction" et met laccent sur les mesures destinées à faciliter le passage entre les diverses formes de secondaire. Mais elle écrit aussi dans son rapport quelle nest pas encore parvenue à procurer de stage à létranger à des élèves du cycle court (Hauptschüler) alors quelle arrive à en trouver dans divers pays pour les élèves du collège et du lycée (Europaschule in Hessen, 1994, p. 58 et 68). Le centre de formation professionnelle du district Lahn-Dill de Dillenburg souligne lui aussi les efforts quil fait pour insérer les adolescents défavorisés (qui présentent des déficits au niveau de lapprentissage, des résultats scolaires, du comportement ou du langage) en utilisant des méthodes didactiques proches de la pratique (Europaschule in Hessen, 1994, p. 50 et 52). Lécole Alexander-von-Humboldt de Viernheim (école polyvalente coopérative avec deuxième cycle de lycée) fait ressortir ce quelle fait pour intégrer les élèves handicapés (Europaschule in Hessen, 1994, p. 45), cependant que lécole du même nom de Rüsselsheim tente en particulier dassimiler les élèves étrangers et dinformer et, dans la mesure du possible, de faire participer leurs parents à la vie de lécole (Europaschule in Hessen 1996, p. 15 et 17). Le Centre de formation professionnelle de Bad Hersfeld, tout comme lécole August-Bebel de Wetzlar, mettent laccent sur les réseaux établis avec dautres écoles, des organismes non scolaires et des associations libres, des maisons de jeunes ou encore des industriels ou commerçants locaux pour la promotion denfants de familles peu cultivées" ou délèves étrangers (Europaschule in Hessen 1996, p. 25 et 38).
2.2.2 Amélioration des compétences linguistiques et médiation culturelle
Cest le domaine expressément évoqué au premier point de lappel doffre et dont la présence est très sensible dans toutes les Ecoles dEurope ; il faut toutefois remarquer que la conception des Ecoles dEurope ne se réduit pas à un simple surplus dans le domaine des langues étrangères, comme lont fait certains pays et certains Länder, ni ne propose de concept particulier au niveau des langues (éducation au plurilinguisme, lingua-franca, compréhension passive de plusieurs langues, etc.). Toutes les Ecoles dEurope développent des activités particulières en matière dapprentissage des langues, de médiation culturelle, de rencontres internationales et déchanges scolaires. La plupart ont élargi leur éventail de langues étrangères, en particulier au niveau de la troisième langue, et/ou ont modifié lordre doption pour les langues ; on remarquera ici que la possibilité dopter pour le russe ou le polonais en tant que première langue se trouve à plusieurs reprises dans les écoles à forte proportion denfants de souche allemande venus des pays de lEst, alors que les langues des élèves étrangers sont plutôt proposées comme 2ème ou 3ème langue. Il faut toutefois dire quil existe dans ce domaine un enseignement de langue maternelle" important et une ouverture délibérée de cet enseignement à tous les élèves. Lenseignement des langues étrangères est encore intensifié dans beaucoup décoles par exemple par lenseignement bilingue, par des cours intensifs de langues à létranger, par lapprentissage précoce dune langue étrangère à lécole primaire (Europaschule in Hessen 1996, p. 2) et par lemploi de nouveaux médias (PC). La médiation culturelle au sens de rencontre interculturelle et douverture aux diverses cultures, en particulier celles qui sont représentées à lécole, dans sa zone de desserte et en Europe, est un centre dintérêt qui se retrouve également dans les conceptions de toutes les écoles (par exemple par une intégration en tant que principe denseignement, par la définition doptions dans certaines matières ou par des manifestations culturelles spécifiques) et dans leur coopération avec des organismes extérieurs à lécole. Lintérêt marqué par diverses écoles dans ce secteur est également démontré par leur participation à des Tables Rondes" contre la violence et la xénophobie. Lapprentissage interculturel a aussi fait lobjet de journées détude (Europaschule in Hessen 1994, p. 116 et suiv.). Deux écoles y ont apporté leur expérience de longue date en tant quécoles de lUNESCO. Quelques exemples choisis permettront dillustrer la largeur de léventail des options dans ces deux secteurs :
A lécole Georg-August-Zinn de Kassel, environ un tiers des élèves sont des enfants de souche allemande originaires de lEst et un autre tiers sont des étrangers. Cest pourquoi elle propose les options polonais et russe comme première langue, mais aussi comme langue enseignée jusquau baccalauréat [Abitur]. De plus, il y a des cours dallemand intensifs pour les élèves qui arrivent en cours de scolarité. Les programmes déchanges avec la France, la Pologne et la Russie ont une conception interculturelle (Europaschule in Hessen 1994, p. 53). Le Gymnasium Philippinum" de Marburg est en train de mettre au point un concept de promotion du plurilinguisme dans la tradition des lycées classiques avec le latin comme première langue, auquel viennent sadjoindre ensuite au moins deux et au maximum quatre langues modernes. Le principe de lapprentissage des langues en interconnexion" prévoit une coopération et une concordance entre les cours dallemand, de latin et danglais / italien / espagnol. Il faut noter que langlais enseigné dès le primaire se poursuit dans le secondaire et que le latin y est introduit parallèlement (Europaschule in Hessen, 1996, p. 43). La Schloßschule de Heppenheim, école primaire, enseigne langlais et le français en contact étroit avec une école-rencontre pour chacune des langues et intègre lenseignement des langues maternelles turque, croate et anglais dans son enseignement du matin (Europaschule in Hessen, 1996, p. 55). Le Centre de Formation Professionnelle de Bad Hersfeld met laccent sur linstitution dun enseignement des langues étrangères pour tous les élèves du Centre et associe le travail pratique en atelier et lapprentissage de langues étrangères pour les adolescents défavorisés, en particulier les enfants de souche allemande originaires de lEurope de lEst ou les enfants de réfugiés. Dans ce cas précis, lapprentissage interculturelle apparaît dans les tentatives de vaincre les préjugés contre les contacts internationaux, aussi bien chez les élèves que dans lenvironnement social de lécole (Europaschule in Hessen 1996, p. 22-26). Même sil est dans la nature des choses quil existe un rapport entre lapprentissage des langues étrangères, les rencontres entre élèves, les échanges scolaires et lapprentissage interculturel, ce dernier ne se résume nullement à cela. Lécole Alexander-von-Humboldt de Viernheim par exemple ne considère pas lapprentissage interculturel comme un domaine isolé de lenseignement, mais sefforce au contraire den faire un principe denseignement (par exemple en modifiant le contenu de lenseignement dans diverses matières, en identifiant les situations génératrices de conflit dans la vie quotidienne, en utilisant les expériences faites par les élèves étrangers dans lenseignement et en participant à des initiatives contre la xénophobie) (Europaschule in Hessen 1994, p. 48). Elle organise tous les ans non seulement des programmes déchanges dans le cadre des jumelages de ville, mais aussi divers voyages destinés à favoriser les rencontres (par exemple des camps pour travailler ensemble en un tiers lieu).
2.2.3 Formation et qualification de personnes aptes à diriger et à développer des projets européens
Ce point nest pas évoqué directement non plus dans le programme. De fait, les chefs détablissement et tous les membres du comité de planification et de pilotage" dune Ecole dEurope profitent dune formation complémentaire. Ceci se fait dun côté sur la base de la pratique personnelle par le biais de la participation à des congrès destinés à fixer les grandes lignes, des échanges de vues avec les enseignants et enseignantes des autres Ecoles dEurope, en partie au-delà des frontières du Land de Hesse (cf. Europa in der Schule 1995) et surtout dans le cadre du suivi scientifique externe au moyen de deux réunions annuelles auxquelles participent en particulier les coordinateurs" de toutes les Ecoles dEurope. Les coordinateurs sont des personnes choisies par les chefs détablissement et le comité de planification et de pilotage au sein de ce dernier ; elles sont chargées de soccuper en particulier des questions de fond et de forme ainsi que de la coordination avec lévaluateur. Outre les coordinateurs, il y a des task groups" (groupes de travail) dont les membres se consacrent surtout à lavancement de lécole dans certains domaines difficiles. Les membres de ces groupes de travail sont généralement des enseignants de lécole en question. Lune des options majeures du travail dévaluation pour lannée scolaire 1996/97 est lélaboration dun concept systématique de formation continue du corps enseignant pour les Ecoles dEurope. Cest un terrain inconnu pour le système éducatif allemand. A lavenir, lavancement personnel des enseignants (en particulier par une formation complémentaire) devra avoir un rapport avec le niveau de réalisation actuelle du programme de lécole.
2.2.4. Développement de nouvelles compétences du corps enseignant quant à lEurope et à la Dimension Européenne
Les projets et les coopérations européennes, lintégration de la dimension européenne dans lenseignement des diverses disciplines et le travail en communauté avec des institutions et des organismes tels que les comités de jumelage des communes et les associations dimmigrés, ainsi que la collaboration avec des écoles étrangères, produisent une formation continue. Certaines questions centrales font lobjet de congrès organisés pour toutes les Ecoles dEurope et de stages de formation au sein des écoles. La solution de problèmes concrets (comme lintégration de la dimension européenne dans le cours dhistoire ou les méthodes dintroduction de la dimension européenne dans la coopération pédagogique avec les écoles étrangères et les échanges scolaires) est souvent cherchée en formation au sein de lécole, par léchange dexpérience avec les autres écoles, mais aussi au sein dassociations spécifiques.
Les enseignants des Ecoles dEurope effectuent en outre un travail de pionniers en ce qui concerne la mise au point de concepts de jumelage multilatéraux. Leurs échanges didées en particulier en fait des experts en matière de relations avec les institutions de lUnion Européenne.
2.2.5 Formation professionnelle initiale et complémentaire des membres des inspections et des directions détablissement quant à louverture du système éducatif à son environnement et à lEurope - Garantie de la qualité de lenseignement scolaire
Louverture à lenvironnement compris en tant que zone de desserte de lécole" fait partie intégrante de la conception des Ecoles dEurope en Hesse ; en tant quouverture à lenvironnement écologique dans le sens dune éducation écologique, elle est encore plus expressément souhaitée. La qualité de lenseignement scolaire nest pas un aspect explicite du programme ; elle est toutefois implicitement comprise dans lidée que les Ecoles dEurope doivent être de bonnes écoles" pour attirer des inscriptions (cf. Steffens / Bargel 1993), cest-à-dire des écoles qui exercent une force dattraction en tant que modèles innovatifs (comme les magnet-schools" américaines). Lévaluation par un expert étranger prévoit expressément une assurance de qualité" (quality assurance). On définit tout dabord des objectifs précis et accessibles qui sont ensuite soumis à un suivi critique et une évaluation par le corps enseignant dautres écoles (cf. aussi 2.2.4). Les membres de la direction des Ecoles dEurope concernées ont également participé depuis le début aux travaux de planification et de réalisation. Ils ont assisté aux congrès organisés pour définir les grandes lignes et à certaines réunions de travail consacrées à lévaluation. Dans ces réunions, il y a souvent des groupes de travail spécifiques réservés aux membres de linspection ou de la direction des écoles, où le Ministère de lEducation ou les personnes chargées du suivi du projet leur apprennent à manier certains problèmes spécifiques aux Ecoles dEurope (budgets, controlling, évaluation de projets etc.). Toutefois, on peut dire là aussi quil nexiste pas de formation initiale ou complémentaire systématique ; ce sont les tâches à accomplir et les activités sur un thème particulier ainsi que les échanges de vues entre les directions concernées qui priment.
3. Modèles innovatifs en Hesse et appel doffre en tant que nouveau modèle
3.1 Innovations de type "top-down" (par décret den haut)
Particulièrement au cours des années 70 et 80, on peut citer nombre de réformes que lon peut appeler de type top-down", par exemple lintroduction des Directives-cadres pour le Land de Hesse" [Hessische Rahmenrichtlinien] en 1972. La violence des controverses politiques suscitées, qui allaient bien au-delà des frontières de la Hesse, eut un effet polarisant sur les écoles et sur le corps enseignant lui-même, à tel point que cette réforme, conçue comme modèle libéral et démocratique (visant à lémancipation), finit par être considérée comme de type top-down" par un grand nombre denseignants et de parents. Même le fait que ces directives aient été expérimentées pendant des années ny changea rien.
La loi instituant la création de classes dorientation partout en Hesse évoquée au chapitre 2.1, qui visait à élever les chances dinstruction des enfants défavorisés en conservant les classes de primaire telles quelles pour la cinquième et la sixième classe et en reculant la sélection des élèves pour les formes décole classique jusquau passage en septième classe, peut également être considérée comme réforme de type top-down". Des chercheurs renommés dans le domaine de léducation avaient suggéré cette mesure, elle avait été expérimentée en Hesse pendant plusieurs années et introduite essentiellement sur un mode facultatif. Mais elle suscita des réactions violentes chez les parents délèves et les partis conservateurs quand la coalition SPD / Verts avait décidé dinstituer ces classes dorientation par une loi dont lapplication échoua à cause des résultats des élections au Landtag de 1987, à la suite desquelles la nouvelle coalition gouvernementale et le nouveau Ministre (chrétien-démocrate) de lEducation changèrent radicalement de cours. Toutefois, ces derniers ne purent pas tenir la promesse faite pendant la campagne électorale de rétablir partout le système traditionnel avec ses trois éléments distincts, en particulier le Gymnasium (lycée) dès la cinquième classe, à cause de la résistance opposée par les parents et les instances de tutelle des écoles.
Nombre de politiciens spécialistes de léducation et de personnalités de ladministration rejettent aujourdhui les modèles de type top-down parce quils les considèrent comme inefficaces. Bien que les réformes des années 70 et 80 se soient basées sur une étude des besoins et aient ensuite expérimenté dans la pratique le modèle de réforme développé scientifiquement avant de le généraliser, elles ne modifiaient pas assez la pratique pédagogique à lécole. Cette approche na toutefois pas perdu tout attrait jusquà nos jours. Elle conserve sa valeur dans la perspective dune planification exacte et surtout, elle est facile à présenter, logique et convaincante, apparemment prometteuse de succès vis-à-vis de lopinion publique. Aussi cette façon de procéder est-elle dun intérêt particulier pour les politiciens avides de se donner un profil dinnovateurs qui sachent simposer. En outre, comme le montre lexemple des Directives-cadres pour le Land de Hesse" [Hessische Rahmenrichtlinien], on a vu plus dune réforme dintention sincère subir une telle métamorphose dans la pratique.
3.2 Innovations de type "bottom-up" (par la base)
Eu égard à la diversité des écoles en Hesse, mentionnée plus haut, il y existe aussi un grand nombre dexpérimentations scolaires dimportance diverse (environ 120 au total). On y trouve une multitude de modèles issus dune ou de plusieurs écoles ou élaborés dans le cadre dun stage de formation complémentaire pour enseignants. Là, il sagit dinnovations de type bottom-up". Les écoles, pour autant quelles y soient tenues pour des raisons légales (cest-à-dire lorsquil y a modification de la structure de lécole telle quelle est prévue par la loi), font la demande dintroduire linnovation en question auprès des autorités de tutelle. Léventail de ces expérimentations scolaires est très large. Les exemples suivants peuvent donner une impression des innovations venant des écoles : un lycée a fait la demande dintensifier lenseignement de la musique en cinquième et sixième classes pour tous les élèves et de créer une section musicale de la septième classe au baccalauréat [Abitur] en collaboration avec un conservatoire de musique voisin. La concentration de lenseignement dune matière donnée (qui ne couvre que peu dheures de cours dans lemploi du temps) sur un semestre au lieu dune année scolaire ou sur une année scolaire au lieu de deux en est un autre exemple. Une école primaire a fait la demande dintroduire un cours danglais obligatoire pour tous les élèves dès la 1ère classe (en Hesse on enseigne langlais dès la 3ème classe depuis 1990 et en plus le français en option dès la 3ème classe depuis 1993).
3.3 Evolution de linnovation par la pratique
Les idées de réforme liées au programme des Ecoles dEurope ne sont pas nées sans rapport avec la pratique scolaire. Il faut les comprendre comme une interaction entre un mouvement innovatif issu de la base et une volonté de réforme venue den haut. Cest ainsi que tous les types décole, et ce pas uniquement en Hesse, ont multiplié depuis le début des années 80 les activités visant à rendre lenseignement et la vie scolaire plus flexibles. Une série de rapports émanant décoles ouvertes aux réformes montre que ces écoles ne sentendent pas comme simples lieux de transfert de connaissances en vase clos, mais essaient détablir des contacts avec le milieu où vivent leurs élèves et de servir de champ dessai social où élèves, enseignants, parents délèves et voisins de lécole apprennent, agissent et exercent des responsabilités en commun.(cf. entre autres : Veränderte Grundschule [Changement à lécole primaire] 1991 ; Schule ist mehr als Unterricht [Lécole nest pas quenseignement] 1992 ; (Die) sechsjährige Grundschule in Marburg [Lécole primaire à six classes de Marburg] 1992 ; Handeln und Lernen [Agir et apprendre] 1993 ; Arbeiten mit dem Wochenplan [Le plan de travail hebdomadaire] 1993 ; Schule im Stadtteil [Lécole dans le quartier] 1993 ; Plus est en vous - In euch steckt mehr 1995 ; Lernen im Stadtteil [Apprendre dans le quartier] 1995 ; Wenn Schulen sich öffnen [Quand lécole souvre] 1996). On a pu constater dans ce contexte que les processus de réforme ne sont pas aussi rapides partout. Parmi tous les types décoles, il y en a quelques-unes qui sont sur la voie du changement et un grand nombre où continuent à régner la pratique traditionnelle et la stagnation.
Comme on a pu le constater à lexemple de lévolution des écoles polyvalentes, on ne peut pas décréter une réforme den haut ; il faut au contraire quelle soit soutenue et modelée par la base. Si lon examine rétrospectivement la phase de mise en place des écoles polyvalentes intégrées" [integrierte Gesamtschulen] après 1968, on constate un déficit lourd de conséquences : la mise en uvre de la mesure politique ne tombait pas sur un terrain pratique à même de remplir le cadre donné par les changements de structure avec des principes nouveaux sur le fond. Cest pourquoi léchec dun grand nombre décoles polyvalentes intégrées sexplique par labsence dinstruments nécessaires à une pédagogie de diversité, dintégration et douverture scolaires. Cet état de choses a très vite amené les parents à considérer ces écoles comme de second plan et à envoyer les bons élèves dans les lycées (Hentig 1991 ; Schmitt-Wiemann / Schöneweiss 1992). Face à cette situation, nombre décoles polyvalentes intégrées se sont mises à réfléchir sur les structures scolaires intérieures et ont assoupli le système de différentiation stricte des niveaux de connaissances pratiqué jusqualors pour le remplacer par des mesures de différentiation interne de lenseignement, dapprentissage pratique et dorientation vers le sens civique. Elles ont ainsi donné un profil à leur école. Ces efforts, nés du mécontentement du corps enseignant, ont été soutenus du début par lInstitut Hessois pour la Planification de lEducation et le Développement Scolaire" [Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung (HIBS)], par exemple dans le cadre de son projet Suivi scientifique de tentatives de promotion dans les écoles polyvalentes de Hesse" [Wissenschaftliche Begleitung von Förderkonzepten an hessischen Gesamtschulen]. De même, le programme de promotion des écoles polyvalentes de type pédagogique particulier" lancé par le Ministère de lEducation de la Hesse et suivi depuis 1992 par le HIBS vise-t-il à un avancement intérieur des écoles. Il est destiné à consolider et à multiplier les îlots de réforme" dans une mer de normalité scolaire" pour faire comprendre à toutes les écoles que lengagement sur la voie de linnovation ne passe pas inaperçu et quil paye (cf. Abschlußberichte aus dem Projekt [rapports finaux sur le projet] 1987).
Les écoles polyvalentes coopératives" où étaient amalgamés les divers types décoles ont ressenti elles aussi ce besoin davancement pédagogique. Beaucoup dentre elles sentendaient au départ comme des centres scolaires où cohabitaient simplement cycle court [Hauptschule], collège [Realschule] et lycée [Gymnasium]. Elles conservaient la séparation des élèves selon le type décole. La collaboration entre les enseignants des trois types de scolarité était pratiquement inexistante, il y avait peu de coordination curriculaire et la possibilité de passer dun type à lautre représentait une exception. Le projet-pilote, mis en uvre de 1982 à 1987 par le Ministère de lEducation de la Hesse et suivi par le HIBS, qui sintitulait Soutien pédagogique pour les écoles polyvalentes coopératives" [Pädagogische Unterstützung schulformbezogener Gesamtschulen (PUSCH)], a créé un cadre à divers projets de réforme qui sétaient déjà établis dans certaines écoles. Ces projets concernaient particulièrement les caractéristiques pédagogiques et didactiques, la volonté dorganiser des cours communs à des élèves de divers types de scolarité, lenseignement interdisciplinaire dans le cadre de projets touchant des problèmes-clés (multiculturalisme, écologie, pauvreté et richesse, etc.) et louverture de lécole vis-à-vis de son entourage (cf. Gemeinsames Lernen in Projekten [Apprendre ensemble au moyen de projets] 1986). Lorsque le projet-pilote arriva à son terme en 1987, il entraîna la perte des moyens personnels et matériels supplémentaires quil avait apportés. En effet, le projet-pilote avait laissé aux écoles concernées une grande marge de manuvre et sétait appuyé sur la volonté de réorientation didactique et méthodologique qui existait au sein du corps enseignant ; ces activités ne pouvaient pas être poursuivies sous la forme initiale. Toutefois, ce projet-pilote a eu un impact à long terme sur lavancement pédagogique des écoles concernées et a motivé dautres écoles à entrer en contact avec les écoles qui y avaient participé pour échanger des idées (cf. Schule im Spannungsfeld von schulaufsichtlicher Vorstrukturierung und autonomer Weiterentwicklung" [Lécole entre les structures administratives et lautonomie] 1995). Ceci aboutit à établir des orientations communes pour lavancement pédagogique envisagé, par exemple la promotion de lapprentissage international par le dialogue, lextension de lespace accordé à des formes denseignement et dapprentissage comme le plan de travail hebdomadaire, le travail autonome et lapprentissage orienté vers laction, des mesures destinées à améliorer latmosphère de lenseignement, des réformes des horaires de cours et des emplois du temps des diverses classes, une ouverture de lécole au quartier, des tentatives dévolution vers une école offrant des cours et des animations toute la journée, une amélioration de la coopération au sein du corps enseignant (lenseignement par équipe, lassistance mutuelle à des cours), la mise en place de nouvelles structures de collaboration entre lécole et lentreprise. Le HIBS servait ici de médiateur et a joué un rôle décisif concernant la reprise didées émanant du groupe de travail des directeurs décoles polyvalentes" [Arbeitskreis der Gesamtschuldirektoren] et des congrès des écoles polyvalentes coopératives" [Fachtagungen der großen Runde der fachbezogenen Gesamtschulen] ainsi que la synthèse didées et de propositions venant de la base et de considérations de politique déducation venant du sommet.
3.4. Lappel doffre en tant que nouveau modèle
La procédure dappel doffre choisie pour lintroduction des Ecoles dEurope contenait des éléments dinnovation à pilotage centralisé et y associait ladmission déléments développés par les écoles elles-mêmes. Elle évitait ainsi en majeure partie les écueils des processus de changement ordonnés par ladministration et du manque de clarté des modèles qui ne concernent quune école. En fixant des objectifs communs touchant divers champs dactivité scolaires, on conservait un contexte global. Par ailleurs, chaque école était tenue au départ de présenter une particularité déjà mise en pratique et dapporter des idées de développement dans les domaines définis par le projet. Une autre condition préalable était que les écoles candidates devaient montrer au cours dune visite sur place que la direction de létablissement, le corps enseignant, ainsi que les représentants des parents délèves et des élèves partageaient les orientations de base et la volonté de réforme, de même que linstance de tutelle. Pour ce, il fallait que tous considèrent lécole comme un espace vital et éducatif commun, comme le produit defforts communs auxquels chacun contribue délibérément et comme un élément essentiel du quartier ou de la commune. Ce modèle offrait donc aux écoles actives la possibilité dexpérimenter et daménager ce que la majorité des intéressés trouve bien, souhaitable et réalisable pour lécole. Ce qui nempêche pas quil faille veiller à ne pas abandonner lécole à elle-même et à son zèle de réforme. Il est indispensable quil y ait un échange au niveau des idées ainsi quà celui des étapes de la réalisation, des succès, des problèmes et des échecs. En outre, lappel doffre prévoyait déjà lappui dinstituts officiels du Land (HILF, HIBS) ainsi quune évaluation externe.
4. Pilotage et suivi scientifique
4.1 Pilotage par les instituts HIBS et HILF
Le programme du Land pour les Ecoles dEurope devait donner aux écoles concernées la possibilité de développer un profil scolaire individuel dans le cadre des cinq centres dintérêt fixés. Aussi la conception était-elle relativement ouverte et offrait aux écoles un vaste éventail de possibilités sur le plan didactique et méthodologique. Le pilotage du processus, la documentation du déroulement et la connexion des écoles entre elles étaient destinés à soutenir les efforts faits par lécole dans ce sens. Etant donné les expériences faites jusqualors avec dautres réformes, on pouvait être certain que les écoles atteindraient très vite la limite de leurs capacités de développement de leur profil individuel sans impulsions de lextérieur du fait que, dans la pratique, les tâches journalières ne laissent guère de loisir à la réflexion et au développement de nouvelles conceptions. Cest pourquoi les deux instituts pédagogiques du Land, lInstitut Hessois pour la Planification de lEducation et le Développement Scolaire" [Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung (HIBS)] et lInstitut Hessois de Formation Continue des Enseignants" [Hessisches Institut für Lehrerfortbildung (HILF)] étaient chargés de piloter et daider les Ecoles dEurope au cours du processus davancement pédagogique.
Les centres régionaux du HILF devaient surtout organiser des mesures de formation des enseignants pour une école donnée et servir de conseillers en matière de méthodes didactiques. Au niveau central, il sagissait essentiellement daspects plus généraux de consultation, de documentation, de coordination et dinterconnexion.
Ainsi, les deux instituts du Land ont participé dès le départ à la planification, à la réalisation et à lévaluation des congrès du Ministère de lEducation de la Hesse auxquels étaient invités non seulement les Ecoles dEurope et les Ecoles dEurope associées, mais aussi des membres de linspection et des experts externes. Dans chaque cas, des points particuliers du programme du Land servaient de référence pour le choix des thèmes. Les premiers congrès destinés à fixer les grandes lignes avaient pour thèmes la pédagogie de réforme" [Reformpädagogik], linstruction et léducation interculturelle" [Interkulturelle Bildung und Erziehung] et la coopération entre école et quartier" [Zusammenarbeit zwischen Schule und Stadtteil]. Ces congrès étaient essentiellement destinés à dresser un inventaire, à échanger des idées et des expériences et à servir dorientation au travail de développement des écoles.
Le pilotage et les conseils donnés étaient centrés sur une définition commune de problèmes et lélaboration de stratégies réalistes pour les résoudre. Ils étaient basés sur les besoins émanant de la pratique scolaire. Lidentification de ces besoins et la solution des problèmes résultant de la mise en pratique du programme sur place devinrent ensuite eux-mêmes partie intégrante du projet de réforme.
Au cours de la phase initiale du programme du Land, lInstitut Hessois pour la Planification de lEducation et le Développement Scolaire a pris une part active au travail dinformation en publiant un ouvrage (Europaschulen in Hessen 1994) qui traitait essentiellement des bases théoriques du programme, brossait le portrait des écoles concernées et plaçait le projet dans le contexte général des mesures de développement scolaire en Hesse. En outre, lInstitut a conseillé et aidé les écoles pour leur permettre de rédiger leur portrait et leurs rapports dactivités, délaborer des curricula spécifiques, de planifier et de réaliser des réunions dinformation à lécole et de mettre en route des échanges de vues.
Il était prévu que le pilotage extérieur devait se rendre superflu à la longue. Les intéressés devaient eux-mêmes acquérir des compétences dexpert et être à même de prendre la responsabilité de leurs actes dans la mesure du possible. En aidant les écoles à résoudre leurs problèmes, il fallait - autant que possible - se servir des ressources disponibles chez les intéressés et les activer. Linterconnexion et la coopération constructive entre tous les organismes concernés par le programme du Land (Ministère de lEducation, instituts du Land, instances de tutelle des écoles, inspections scolaires) représentaient les conditions préalables au succès de la phase de pilotage. Lobjectif commun était de faire des Ecoles dEurope des ateliers pédagogiques régionaux du futur [Zukunftswerkstätten]. Elles devaient servir de pionniers et entraîner dans leur sillage les écoles de leur région. Ces dernières devaient reprendre les éléments qui sétaient avérés efficaces pour modeler la vie scolaire et louverture au monde et sen servir pour leur propre développement.
4.2 Suivi scientifique par un expert étranger
Pour ladministration, la décision de mettre en pratique lidée des Ecoles dEurope était doublée de la peur de se remettre sur le poil" des processus incontrôlables. Par la voie de compromis politiques, on trouva une solution qui sétait avérée praticable dans dautres domaines : le pilotage dinnovations scolaires par un expert externe impartial. Le procédé avait déjà fait ses preuves au cours du processus dagrément des Ecoles Libres" [Freie Schulen] sous la première coalition gouvernementale SPD / Verts. Etant donné le rôle davant-garde internationale que les Ecoles dEurope étaient destinées à jouer, le service compétent au Ministère de LEducation proposa de confier le suivi du programme des Ecoles dEurope à un expert confirmé de léducation à lEurope. On trouva en Gordon Bell (Université de Leeds, Angleterre) un scientifique qui possédait déjà une grande expérience en matière déducation à lEurope. Lintégration du professeur duniversité anglais dans le programme nétait pas sans difficulté. Ses projets dévaluation et le pilotage du programme par les institutions du Land de Hesse (HIBS et HILF) furent définis comme des domaines distincts, reliés par des agents de liaison.
On installa dans les écoles des groupes de planification" [Planungsgruppen] chargés pour commencer de faire un bilan de la situation donnée. Un coordinateur" fut ensuite choisi au sein du corps enseignant de chaque école pour servir de responsable des contacts dans le groupe de planification ; à cet effet, il était déchargé dune partie de ses heures de cours pour pouvoir consacrer une part de son temps à la mise en uvre des mesures dinnovation. Létape suivante consistait à formuler un Mission Statement" (concept de lécole) où lécole définissait ses objectifs globaux. Parallèlement, le groupe de planification formulait des programmes scolaires qui devaient contenir des objectifs dévolution sur plusieurs années et des projets vérifiables. Sur la base du bilan initial dressé au début de lévaluation, on établit tous les ans un plan daction qui définit les objectifs à atteindre ; des subdivisions du groupe de planification sont chargées de la mise en pratique. Des rapports dévaluation semestriels permettent de vérifier la réalisation de chaque étape. Les rapports annuels des écoles servent de base aux rapports dévaluation globaux du Prof. Bell, qui sont remis au Ministère de lEducation, aux deux instituts du Land (HIBS et HILF) et aux écoles pour être ultérieurement discutés au cours de conférences communes. Les coordinateurs se rencontrent plus fréquemment (environ quatre fois par an). Pour ce qui est du contrôle de qualité, on a en outre mis en place une évaluation interne des projets et une évaluation externe décole à école (un genre dexamen dégal à égal). Des rapports sur quelques exemples de succès pratiques (examples of good practice") ont été transmis à tous les groupes travaillant sur des projets scolaires.
Lintroduction dun controlling des projets, destiné à améliorer ou à éliminer des projets sans valeur et à reconsidérer continuellement le coût et le profit des investissements, a permis dexpérimenter une nouvelle qualité de réflexion économique dans les écoles. La prochaine étape, qui consiste à établir des normes de qualité applicables à toutes les écoles (benchmarking), va être réalisée incessamment. Les Ecoles dEurope offrent en outre le premier exemple dune ébauche de formation systématique du corps enseignant [Personalentwicklung] en Hesse. Jusquà présent, la formation continue professionnelle dans les écoles de Hesse passait généralement pour une activité volontaire de certains enseignants, souvent même considérée comme gênante par certains directeurs détablissement. Dans les Ecoles dEurope, la formation du corps enseignant sur la base du programme de lécole est reconnue comme une mesure indispensable dans le cadre du concept global dévolution de lécole.
Lintégration de processus de développement et de projets dactivités dans une conception globale sapplique aussi à lavancement systématique des centres dintérêt des Ecoles dEurope. Les projets de curriculum concernant la dimension européenne ou léducation à lécologie font lobjet déchanges entre les écoles et sont ensuite traités par des groupes de travail communs ou dans chaque école (en tant que task groups").
5. Innovations sur le fond et la structure dans les Ecoles dEurope
Au cours des cinq années de leur existence, les Ecoles dEurope en tant que modèles innovatifs ont fait des progrès énormes aussi bien sur le fond quen matière de modification des structures internes. Ainsi, une vaste travail de prise de conscience a été effectué pour faire passer le message de la Dimension Européenne (comprise comme ébauche de concertation interculturelle). On peut déjà noter comme résultat que les Ecoles dEurope proposent bien plus souvent quautrefois des manifestations sur des thèmes européens ou interculturels. Lécole Alexander-von-Humboldt de Viernheim par exemple a institué des projets tels que la coopération interculturelle à lécole" ou latelier pour un livre de lecture européen" (Europaschule in Hessen 1994, p. 43 et suiv.). Cet exemple montre à lui tout seul que lapproche de la Dimension Européenne présente de multiples points dintersection" avec dautres aspects des cinq centres dintérêt de lObservatoire mentionnés plus haut.
Les projets européens ouvrent de nouvelles perspectives dactivité, en particulier vis-à-vis du quartier ou des parents et des enfants dorigine étrangère. Ainsi, lécole Georg-August-Zinn de Kassel a mis à profit le projet intitulé le polonais - langue et culture dun pays voisin du nôtre" et le cours déchecs pour joueurs de niveau avancé" non seulement pour préparer léchange prévu avec une école polonaise, mais aussi pour assimiler les élèves de parents de souche allemande originaires de lEst et les élèves venus de lancienne U.R.S.S.
Au total, on trouve dans les Ecoles dEurope environ deux fois plus de projets dont le thème tourne autour de la Dimension Européenne et des cinq principes de base dans les animations de laprès-midi que dans les écoles où les cours sont étalés sur toute la journée ou dans dautres écoles offrant des animations laprès-midi, qui sont nettement mieux subventionnées. Dans le cadre des connexions établies entre les écoles, presque toutes les Ecoles dEurope ont créé entre autres des projets utilisant la messagerie électronique (E-mail) pour communiquer régulièrement avec dautres écoles, des classes ou des élèves décoles jumelées dans le monde entier. Le travail de réseau profite aussi sur le fond de la réalisation de conférences et de projets multilatéraux (en partie virtuels). En raison du retard technologique des écoles, pas seulement en Allemagne, celles-ci ont été obligées de faire de gros efforts dinvestissements au départ pour acquérir les équipements nécessaires ; elles en recueillent maintenant les fruits petit à petit. Sans les moyens supplémentaires venus du budget des Ecoles dEurope, ces écoles auraient sûrement dû attendre encore longtemps lamélioration de leurs équipements techniques. Souvent, ce sont les projets interculturels qui ont poussé les autorités de tutelle (villes et districts ruraux) à effectuer dans les Ecoles dEurope des investissements pour leur permettre dy améliorer la qualité du séjour et léquipement médiatique. Cest ainsi que lécole Georg-August-Zinn de Kassel déjà évoquée plus haut possède maintenant un bâtiment construit avec laide des parents, dentreprises locales, dun centre de formation professionnelle et de lautorité de tutelle, qui abrite un atelier pour vélos.
Mieux le travail de réseau fonctionne dans les Ecoles dEurope et plus les échanges scolaires perdent de leur attrait dautrefois en tant que voyage touristique accompagné de visite dans une famille ; de plus en plus, les échanges deviennent des réunions de travail" au cours desquelles des projets communs ou des stages dans des institutions et organismes du pays daccueil sont au premier plan.
Au cours de la période dévaluation (cest-à-dire depuis 1993), les Ecoles dEurope ont été amenées systématiquement à instituer un nouveau type de structures scolaires internes. Le fait dêtre responsable de la gestion de leur budget les a obligées à concevoir lécole comme une entité globale - idée entièrement nouvelle pour lAllemagne. Pour la première fois, il fallait considérer le coût et lintérêt des investissements et des projets et peser le pour et le contre. Lévaluation continue des projets a renforcé le sens de léconomie au sein des directions détablissement et des comités de planification. Le compte-rendu régulier du succès ou de léchec de mesures de développement scolaire à laide dun système de documentation bien organisé sest avéré bénéfique pour le développement systématique des écoles.
6. Problème des écoles associées
Nous avons déjà indiqué plus haut que le premier appel doffre avait eu beaucoup de succès auprès des écoles intéressées. Cest peut-être dû au fait quelles entrevoyaient pour la première fois la chance de disposer de ressources financières individuelles. Cette remarque ne se veut nullement péjorative et ne veut pas dire que ces écoles naient pas eu dintérêt pour le fond du projet. Cela démontre plutôt le manque de modernisme du système scolaire par contraste aux désirs et aux aptitudes des personnes qui y travaillent. Toutefois, pour certaines écoles, cétait vraiment le fond qui primait. La déception de ces écoles en fut dautant plus grande de ne pas être sélectionnées comme écoles principales" [Kernschulen] mais dobtenir seulement le statut dEcole dEurope associée" [assoziierte Europaschule]. Persuadées de leur aptitude à remplir les critères mentionnés dans lappel doffre, elles se sentirent déclassées. Les écoles associées" reçoivent des subventions pour des projets donnés dans le cadre des cinq orientations principales des Ecoles dEurope mentionnées plus haut, mais elles ne sont pas soumises aux mêmes exigences de réforme de leurs structures scolaires et ne possèdent généralement pas de programme global comparable.
Lors de lextension du programme, beaucoup dentre elles nont pas pu non plus rejoindre le cercle des écoles principales", qui sont davantage subventionnées, ce qui fait quon a maintenant un système hybride avec des relations floues entre les école principales" et les écoles associées". La connection régionale entre écoles associées" et écoles principales" nexiste pratiquement quen théorie. Cest pourquoi lintention initiale, qui visait à faire des premières Ecoles dEurope le noyau de cristallisation du développement scolaire de leur région, en est encore à ses débuts.
7. Effet et force dattraction du modèle sur dautres écoles
Le programme des Ecoles dEurope ouvre de nouvelles perspectives pour expérimenter ce que demande la nouvelle loi scolaire en Hesse. Cette loi forme le cadre du développement pédagogique de toutes les écoles du Land de Hesse. Elle donne une plus grande marge de manuvre aux écoles dans leur ouverture sur la communauté. Elle renforce lautonomie des écoles, mise sur lintégration et conçoit lécole comme un espace où lon puisse expérimenter et appliquer les principes de la démocratie. Les intentions quelle exprime soutiennent explicitement les efforts de toutes les écoles qui ne veulent pas être de simples lieux de transmission de connaissances. Dans ce contexte, les Ecoles dEurope ont pour tâche détudier la pertinence de procédés didactiques, méthodologiques et administratifs pour lavancement de toutes les écoles de Hesse et den dégager le potentiel et les limites en vue dun transfert à dautres. Les Ecoles dEurope se transforment donc en bourse aux idées" pour toutes les autres écoles, sont les pionniers de lextension de la mission éducative de lécole face aux exigences globales et européennes de notre époque. A cet effet, elles mettent laccent sur lapprentissage international et écologique et sur une extension de lapprentissage des langues dans le cadre de projets internationaux et européens et effectuent un travail de qualification à la coopération sur le plan européen et international.
8. Réalités et perspectives de linnovation
Le modèle des Ecoles dEurope nest quun des multiples plans de réforme du système scolaire de Hesse, mais il occupe une place de choix quant à ses prétentions, à son rayonnement et aux modifications déjà réalisées dans les diverses écoles, bien quil ne soit ni le plus vaste ni le plus coûteux des programmes. Sans vouloir porter ici de jugement prématuré, on peut déjà dire que le programme des Ecoles dEurope et les écoles elles-mêmes ont engendré une multitude didées qui ont été portées à la connaissance dun vaste public dans les milieux intéressés, soit par diverses publications, soit par des manifestations de toutes sortes, voire même par des cours duniversité dans le cadre de la formation des enseignants. Les changements et les succès mentionnés dans ce rapport nécessitent encore dun côté une consolidation, de lautre une progression et la preuve de leur bien-fondé. Comme nous lavons dit plus haut, on verra si les changements sont solides et durables lorsque le suivi scientifique externe arrivera à son terme, cest-à-dire sous peu. Lavenir et les chances dextension du modèle des Ecoles dEurope relèvent bien sûr aussi des décisions politiques. Il faut donc attendre de voir si le budget attribué permet délever" les écoles associées" au rang des écoles principales". La mise en place de nouvelles formes de financement (par exemple la gestion du financement du personnel par les écoles, chose impensable en Allemagne jusquà présent) pourrait permettre à plusieurs écoles de se mettre sur les rangs sans rien changer à la masse de ressources actuelles.
Quoi quil en soit, lavenir du modèle semble se présenter sous des auspices favorables car les Ecoles dEurope ont nettement changé ; plus de personnes sy occupent de questions concernant le développement scolaire, de nouvelles structures ont été établies (par exemple des comités de planification et de pilotage), et il existe à présent des interconnexions au-delà de lécole individuelle. Les Ecoles dEurope ouvrent la voie à de multiples changements, souvent toutefois sans être citées en exemple digne dimitation par ladministration scolaire et parmi les écoles voisines. Un pas décisif a également été franchi en direction dune meilleure liaison entre les diverses disciplines dans les écoles. On peut en citer pour exemple lélaboration de curricula spécifiques sur des thèmes apparemment simplistes comme : quelles connaissances et compétences doivent avoir des élèves pour faire des observations écologiques, évaluer des résultats de mesure, les représenter à laide de figures et rédiger un rapport".
On peut toutefois faire aussi quelques remarques critiques : on voit demblée que, dans le domaine de lapprentissage des langues, les langues vivantes traditionnelles (cest-à-dire européennes) ont conservé leurs privilèges même là où lorigine des élèves semblerait suggérer un autre ordre de langues (cf. chapitre 2.2.2.). Ainsi, même dans les Ecoles dEurope où le taux délèves turcs est élevé, on ne trouve nulle part le turc comme première ou deuxième langue. Il ny a que des explications partielles pour cet état de choses : par exemple, il manque des enseignants qui aient les qualifications requises pour certaines langues. Ce nest pas le cas pour le russe ni le polonais, car on dispose de tels enseignants depuis longtemps en Hesse. Dans ce contexte, les écoles parlent entre autre de problèmes sur le plan de lacceptation du côté des parents et des entreprises locales. Autre point critique, le fait que les échanges, en particulier au sein de réseaux multilatéraux, ne puissent pas toujours trouver de place adéquate dans le curriculum de lécole, et ce non par manque didées, mais parce quil faut trouver un compromis acceptable par toutes les écoles jumelées avec leur conditions marginales spécifiques, leurs règlements et leurs limites sur le plan du personnel, des finances et des curricula.
Nous espérons que ce rapport a permis de montrer les avantages du programme ouvert aux orientations relativement globales que représentent les Ecoles dEurope", ainsi que ses défauts, par exemple quant aux possibilités de comparaison et dextrapolation. Les exemples pratiques de succès sont certes intéressants et souvent utiles, mais ils ne remplacent pas le débat général sur lapprofondissement des perspectives. Le succès général de la réalisation du programme des Ecoles dEurope peut à notre avis contribuer à promouvoir ce débat au niveau national comme sur le plan international.
R.F.A. | République Fédérale dAllemagne, 81 millions dhabitants (1993), 228 au km², 356 854 km² |
CDU | Parti chrétien-démocrate allemand [Christlich-Demokratische Union] |
U.E. | Union Européenne |
HeLP | Institut Hessois de Pédagogie [Hessisches Landesinstitut für Pädagogik], au sein duquel seront réunis le HIBS et le HILF (voir plus bas) à partir de lété 1997 |
HIBS | Institut Hessois pour la Planification de lEducation et le Développement Scolaire [Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung], siège à Wiesbaden, institut de recherche et de développement subordonné au Ministère de lEducation du Land de Hesse [HKM]. |
HILF | Institut Hessois de Formation Continue des Enseignants [Hessisches Institut für Lehrerfortbildung], composé dun service central, de trois annexes régionales et 13 services locaux. Propose des stages de formation continue à léchelon central, régional et local, ainsi que des cours de formation pour une école particulière. |
HKM | Ministère de lEducation du Land de Hesse [Hessisches Kultusministerium], responsable entre autre du système éducatif de lécole primaire à la fin du secondaire (baccalauréat [Abitur]), formation professionnelle scolaire comprise, ainsi que du corps enseignant en Hesse. |
SPD | Parti social-démocrate allemand [Sozialdemokratische Partei Deutschlands] |
GRÜNE (LES VERTS) |
Depuis 1991 rebaptisés Alliance 90 / Les Verts [BÜNDNIS 90 / DIE GRÜNEN], le plus petit des partenaires au sein de la coalition gouvernementale avec le SPD, dont cest actuellement la troisième législature en Hesse. |
10. Bibliographie complémentaire
© Innova : Observatoire européen des innovations en éducation et en formation / European Observatory for Innovation in Education and Training, juin 1998.Abschlußberichte aus dem Projekt Wissenschaftliche Begleitung von Förderkonzepten an hessischen Gesamtschulen"[rapports finaux sur le projet suivi scientifique de tentatives de promotion dans les écoles polyvalentes de Hesse"]. Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung, 1987, 300p.
Allemagne, faits et réalités. Frankfurt am Main : Societäts-Verlag 1993, 491 pages, ISBN 37973-0554-0, 491 p. [distribué par le Ministère des Affaires étrangères (Außenministerium à Bonn) de la R.F.A.]
Arbeiten mit dem Wochenplan [Le plan de travail hebdomadaire]. Wiesbaden: Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung, 1987, IV+25 p., ISBN 3-88327-295-5.
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Commission des Communautés Européennes : Livre vert sur la dimension européenne du système éducatif encore à préciser en lange francaise (c.f. comparer avec le texte!!!)
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Enseigner lEurope dans nos sociétés multiculturelles / Teaching Europe in multicultural society (Ed.: Christoph Kodron; Ingelore Oomen-Welke). Freiburg i.Br.: Fillibach 1995, 451 S. ISBN 3-931240-002.
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Europaschule in Hessen. Eine Perspektive für die Schule von morgen - Ergänzungsband. (Ed. : Christian Kubina ; Birgit Schulz) [même titre - supplément] Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung (HIBS) 1996 ISBN 3- 88327-347-3
Version anglaise du précédent: (The) Europe School in Hesse, Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung, Supplement to No. 23, Materialien zur Schulentwicklung Nr. 20, 1996, 55 S. ISBN 3- 88327-333-3
Europaschulen, Das Magazin, février 1997
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Schule im Spannungsfeld von schulaufsichtlicher Vorstrukturierung und autonomer Weiterentwicklung. Untersuchung im Rahmen des OECD-Projektverbunds The Effectiveness of Schooling and Educational Resource Management [Lécole entre les structures administratives et lautonomie - Etude dans le cadre du projet global efficience du système scolaire et gestion des ressources éducatives"]. Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung, Arbeitsgebiet praxisorientierte Schulforschung 1995. 300 p.
Schule im Stadtteil [Lécole dans le quartier]. (= Handlungsorientierter Unterricht, Heft 6). Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung 1993, IV + 51 p., ISBN 3-88327-297-3.
Schule ist mehr als Unterricht, Beispiele aus der Praxis ganztägiger Erziehung [Lécole nest pas quenseignement - Exemples pratiques denseignement sur toute la journée]. (= Materialien zur Schulentwicklung, Heft 18). Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung 1992, IV + 170 p., ISBN 3-88327-249-3.
Schulqualität, Entwicklungen, Befunde, Perspektiven [Qualité de lécole, développements, observations, perspectives], Werner Specht, Josef Thonhauser, Ed., Innsbruck-Vienne: Studien Verlag 1996
(Die) Sechsjährige Grundschule in Marburg. Zur Alltagspraxis eines Schulversuchs und zur Geschichte einer pädagogischen Idee [Lécole primaire à six classes de Marburg - Pratique quotidienne dune expérience scolaire et historique dune idée pédagogique]. (=Materialien zur Schulentwicklung, Heft 17). Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung 1992, IV + 147 p., ISBN 3-88327-245-0.
Steffens, Ulrich / Bargel, Tino : Erkundungen zur Qualität von Schule [Explorations quant à la qualité de lécole]. Neuwied, Kriftel : Luchterhand. 1993, 157 pages.
Veränderte Grundschule - Unterstützung durch Beratung, Schwierige Schüler, Pädagogisches Verstehen [Changement à lécole primaire - Aide par la consultation, élèves difficiles, compréhension pédagogique]. (= Schule und Beratung, Heft 2). Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung 1991, 90 p., ISBN 3-88327-246-9.
Was sollen Kinder in der Schule lernen, Erziehung heute für die Welt von morgen [Que doivent apprendre les enfants à lécole - Education daujourdhui pour le monde de demain]. Ed. : Gerold Becker. Documentation sur deux colloques de politique culturelle du parti social-démocrate (SPD) de Hesse les 3 et 17 février 1990 au Landtag de Wiesbaden, 153 p.
Wenn Schulen sich öffnen. Reflexionen, Beispiele aus der Praxis, Perspektiven [Quand lécole souvre - Réflexions, exemples pratiques, perspectives]. (= Materialien zur Schulentwicklung, Heft 24). Wiesbaden : Hessisches Institut für Bildungsplanung und Schulentwicklung 1996, IV +105 p., ISBN 3-88327-364-3.